Negură Bunget - "Măiastru sfetnic" (album, 2000)
Tracklist
1. Vremea locului sortit
3. A-vînt în abis
4. Al locului
5. Bruiestru
6. Plecăciunea mortii
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Faut-il vraiment vous présenter Negură Bunget ? Ce célèbre groupe roumain, aujourd'hui hautement reconnaissable pour son style inimitable, jouait autrefois un Black Metal qui ne brillait pas spécialement par son originalité. Après les premières lueurs de changements du mini "Sala molksa" paru en 1998, les morceaux plus longs rendant possible le développement d'une atmosphère unique. c'est en 2000 que la première évolution dans le style du trio voit le jour, avec la sortie de "Măiastru sfetnic". Un parfum mystique s'échappe de la furie de cette oeuvre si particulière qui retranscrit à merveille les paysages torturés et inquiétants de la Transylvanie, région aux nombreuses légendes occultes, comme celles de la comtesse Bathory, de Dracula ou encore de l'Ecole de Scholomance. Dès le début, on se retrouve saisi dans un monde complètement différent, celui où les éléments de la nature sont retranscrits dans le son des instruments. Les mots ne peuvent décrire la purification spirituelle que l'on reçoit de cet album. De quoi nous égarer dans les forêts embrumées.
"Măiastru sfetnic" nécessite une oreille avertie. C'est un opus très surprenant et étrange, à la forme déstructurée et aux changements de rythme assez perturbants, qui se libère des carcans dans lesquels nous avons l'habitude de nous enfermer. En ce sens, cet album est le prélude de "'n crugu bradului", l'un des meilleurs albums de Black Metal atmosphérique sortis en ce début de XXI. siècle. Cependant, la subtilité de "Măiastru sfetnic" ayant été complètement gâchée par une production plus qu'approximative, nous nous concentrerons sur sa réédition de 2010, qui rend bien mieux justice aux compositions, caractérisées par l'enchevêtrement impénétrable des différentes parties instrumentales.
Même si l'on ne peut s'empêcher de penser à son successeur de 2002, cet album, bien qu'il soit loin de l'égaler, reste lui-même très intéressant pour l'atmosphère qu'il dégage. Il s'agit là d'une évolution capitale dans le style de Negură Bunget: certains passages sont à la limite de l'avant-garde, avec un côté aérien qui reste totalement unique, même hors des passages entièrement atmosphériques. Les compositions sont très travaillées malgré quelques imperfections, surtout au niveau du rythme: les breaks de batterie ne rentrent pas tout à fait dans les temps, pour certains et surprennent l'auditeur par leur audace.
Rendre compte individuellement de chaque morceau en détails serait extrêmement long et complexe, je m'efforcerai donc d'être le plus synthétique possible. La plupart dépassent la barre des neuf minutes, mettant en évidence une variété de tempos, et la transition entre rapidité et lenteur coule comme de l'eau de source, bien que l'on ait parfois l'impression que les trois membres du groupe, dont le niveau technique est plus qu'appréciable, fassent des jams au milieu des chansons, de manière plutôt impressionnante. Cela contribue à accumuler des atmosphères qui s'additionnent entre elles, au risque de créer un cafouillage instrumental parfois difficile à suivre. 'Al Locolui' est un bon exemple de la variété qu'on peut trouver dans "Măiastru sfetnic". Ce morceau nous fait puissamment plonger dans une sorte de transe: des cris qui tentent d'imiter des sonorités qu'on ne peut identifier comme venant de la voix de Hupogrammos ou des synthétiseurs, une lente accumulation qui débouche sur l'entrée en action, à plein régime, de la guitare et des percussions... Le tempo augmente, et l'auditeur ressent l'envoûtante sensation de l'imprévisible grâce à la collaboration des tambours et des guitares. L'envoûtement se poursuit sur les deux dernières pistes dont les introductions sont principalement caractérisées par l'omniprésence du synthétiseur, qui, partout ailleurs dans l'album, reste relativement discret lorsqu'il doit l'être.
"Măiastru sfetnic" est l'un des opus les plus occultés de la discographie de Negură Bunget, et franchement, je ne comprends pas trop pourquoi. Le groupe s'est fait connaitre pour intégrer des éléments folkloriques dans sa musique. Cela est particulièrement visible dans ses oeuvres ultérieures, telles qu' "Om" (2006), mais cet album témoigne de la précocité de cette évolution: un Black Metal atmosphérique teinté de nuances Folk et sympho lui donnant une dimension intéressante et intriguante.
Tom
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