Ma rencontre avec Satyam a été un pur hasard, saupoudré de ces circonstances miraculeuses que seule la vie a le secret. C’était lors de ces innombrables soirées où je naviguais sur cet océan insondable qu’est YouTube, à la recherche de metal aux influences védiques afin de satisfaire mon insatiable appétit pour cette musique qui m’accompagne dans mes pratiques personnelles de yoga, que j’ai découvert le groupe et étais immédiatement séduite par leur musique sombre, rocailleuse et d’une profondeur galactique.
Puis, il se trouve que la vie a décidé de mettre deux des membres du groupe dans mes cours de yoga, ce qui ne fait qu’accentuer ma relation vis-à-vis du groupe, car le partage humain qu’ils m’offrent depuis lors est du nectar des plus merveilleuses des apidés.
J’ai appris que le groupe a traversé beaucoup de choses depuis leur création et a failli connaître la fin il y a un an suite à la perte de leur batteur, Vincent. Mais la solidarité entre les membres et le soutien de leur entourage les ont aidés à tenir le cap ; et plus que jamais, ils ont envie de continuer à créer pour honorer la mémoire de Vincent.
Alors, j’ai envie de leur donner la parole, j’ai envie de les écouter parler de leurs projets, de leur relation au sein du groupe et de leur relation vis-à-vis de la musique. Et c’était donc lors d’une de ces soirées lilloises pluvieuses que j’ai eu l’immense plaisir de partager une bière avec trois des membres de Satyam que sont Cédric (guitare), Franck (chant) et Marion (basse) dans un de ces lieux lillois charmants qui soutiennent les initiatives créatives locales afin de discuter de Satyam et de leurs projets.
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Bonjour Satyam.
Cédric, Franck, Marion :
Bonjour.
Merci de m’avoir accordé cette interview. Pour commencer, pouvez-vous présenter Satyam pour nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore ?
Franck : On peut dire que Satyam est créé suite à la rencontre entre Cédric et moi à l’occasion d’un concert. Nous nous fréquentons depuis lors et découvrons des intérêts communs pour le doom. À cette époque, j’avais envie d’intégrer ou de créer une formation musicale, alors peu de temps après avoir rencontré Cédric, nous avons commencé à composer à deux. C’était il y a 10 ans et c’était les prémices de Satyam même si, à l’époque, cela restait un projet perso de nous deux. Officiellement, on peut dire que Satyam est né depuis 3 ans, car nous souhaitons transformer ce projet en un vrai groupe qui puisse tenir des concerts live.
Alors rapidement, Mike nous a rejoints à la guitare, Vincent à la batterie et Fred à la basse, puis Marion est arrivée un an après pour remplacer Fred.
Pour les pratiquants du yoga, Satyam est en lien avec la 2e règle de vie éthique selon Patanjali, il implique l'examen d'une vérité ultime, Satyam implique la sincérité, l’authenticité… Pourquoi le nom Satyam ?
Cédric : Le groupe ne s’était pas toujours appelé Satyam, c’était Franck qui a donné l’idée de Satyam et tout le monde a adhéré au nom et à l’esprit que ce nom véhicule.
Une petite anecdote à ce propos : sur Deezer, beaucoup d’albums hindous sont labellisés par erreur pour Satyam à cause du terme, et le groupe se retrouve avec une grande base de followers hindous grâce à cette erreur. *Rire*
Pourquoi le choix de faire du blackened doom death ?
Cédric : On ne s’est pas vraiment posé la question, la musique vient de nos influences. Franck aime le death old school et je suis plus black, post-black ; les compositions sont inspirées de ces influences-là au départ. Mais depuis que le groupe est constitué, tout le monde participe au processus de composition, chacun apporte ses influences et ses idées à la composition musicale. Par contre, l’écriture des paroles est le travail de Franck et il a une manière de composer très intuitive. Les textes sont composés en fonction de la musique ; Franck a un processus d’écriture bien à lui, avec des textes dont les thèmes naissent directement des mélodies composées par les autres musiciens du groupe.
Franck : Pour moi, un concert de Satyam est un rituel, donc le travail sur les paroles est très important, ça doit venir de l’intérieur, ça doit communiquer avec le public, ça doit dégager de l’énergie. Les paroles de Satyam font partie de mes recherches personnelles, c’est une tentative de répondre aux questions que je me pose sur la vie, tant au niveau microcosme qu’au niveau macrocosme. Cela vient des interrogations sur comment une personne est touchée par son parcours de vie, par sa recherche d’authenticité, par les blessures de vie, la tentative de comprendre tout cela.
Les paroles viennent aussi de ma vision de vie avec mes propres filtres, ce que j’ai pu effleurer avec mes expériences personnelles. C’est comme un sorte de journal intime spirituel où je chemine avec mes questions concernant la vie. À travers la musique et l’écriture, je creuse des sillons spirituels et humains que, par pudeur, je partage avec parcimonie, avec mes compagnons de musique. Chaque EP sera comme un marque-page dans ce journal où j’y coucherai mes idées, mes découvertes. Satyam est, de cette manière, un cheminement spirituel accompagné de musique pour moi. Les paroles viennent d’émotions ressenties avec la musique composée par les autres membres du groupe.
Marion : Ce partage très instinctif et profond permet de consolider la cohésion du groupe, cela explique que nous partageons une relation très forte entre nous.
Il y a un an, vous avez vécu un drame suite au décès de Vincent, votre batteur… C’est grâce à cette cohésion et cette solidarité que vous avez pu tenir le cap ?
Cédric, Franck & Marion : La perte de Vincent a été très difficile pour nous. Pendant quelques mois, nous nous sommes arrêtés, oui. Et nous nous demandions si nous allions maintenir le groupe, car continuer un projet dans ces circonstances est toujours délicat et difficile et nous n’avions pas le moral à ce moment-là.
Puis, sous l’impulsion d’un ami en commun, Robin, et avec le soutien de notre entourage (famille et amis), nous avons décidé de faire un concert hommage à Vincent avec Robin à la batterie. C’était chose faite avec le grand soutien du Black Lab (que nous remercions encore !). Nous étions très touchés par le soutien du public qui était très nombreux ce soir-là.
Suite à cela, la famille de Vincent nous a encouragés à continuer le projet ; c’était la meilleure chose à faire pour honorer la mémoire de Vincent, pour Satyam. Ensuite, comme Ced Ly a accepté de nous rejoindre derrière la batterie depuis février-mars, nous donnant de nouvelles impulsions, alors nous voilà prêts à repartir du meilleur pied avec Satyam. Le mouvement est relancé.
Votre solidarité est vraiment touchante, merci ! Parlez-moi un peu de vous alors, du line-up actuel de Satyam.
Franck : J’ai toujours aimé chanter, jusqu’à faire chier les voisins sous la douche. Mais je ne m’étais pas investi dans la discipline plus tôt ; j’ai fait partie du chœur de la catho, j’ai fait partie du groupe Thorny Rain en tant que chanteur entre 2012-2013 avant d’intégrer Satyam en 2014.
Cédric : J’ai commencé la musique en 2004, à 14 ans, j’ai démarré en prenant des cours de guitare à l’école. Puis j’ai intégré le groupe Dusk and Darkness entre 2008 et 2021, ensuite, j’ai intégré Slaughtered, groupe de death lillois, à la basse pendant 5 ans. Puis j’ai passé 2 ans dans Sky to Sand (actuellement AHNA) avant d’aller derrière le clavier dans In Entropy, pour finir par me consacrer à fond à Satyam depuis 2021. Et depuis 2024, j’ai intégré Dethscend (doom sludge). Pendant toute cette période, j’ai fait plus de 200 concerts.
Marion : J’ai suivi une formation au conservatoire en piano et basson à haut niveau et j’ai toujours travaillé avec les orchestres symphoniques. J’ai fait plusieurs tournées en Angleterre, en Allemagne avec les orchestres, et fait beaucoup de représentations de musique de chambre. En 2007, j’ai découvert la guitare et le metal via mon professeur de guitare. Suite à cette découverte, je me suis mise à la basse grâce au bassiste de Mudvayne. J’ai formé un groupe avec mon frère dans la foulée mais c’était une expérience qui n’a pas été des plus réjouissantes. Par contre, cette expérience m’a permis de rencontrer Cédric lors d’un concert du groupe. Puis les petits projets s’enchaînent, je me suis mise à jouer de la cornemuse et pour finir, j’ai intégré dernièrement un groupe de folk à la guitare et à l’accordéon. (La dame est talentueuse !)
Cédric : Mike est guitariste depuis de très longues années, il a beaucoup travaillé dans des groupes de deathcore mais a des fibres prog et modernes qui collent bien avec l’ambiance de Satyam ; il a aussi joué dans Abyss Light. Quant à Ced Ly, il fait partie du groupe de power-rock Mad Slugger et il a joué dans Trepanation pendant de longues années.
Avec la machine remise en route, est-ce que vous préparez un nouvel album ?
Non, on préfère prendre du temps. L’idée actuelle est de préparer un EP pour l’année prochaine. On préfère sortir les morceaux au fur et à mesure, comme une manière de faire une transition en intégrant notre nouveau batteur petit à petit dans cette dynamique de groupe. On préfère prendre le temps pour faire ce travail de préparation pour arriver vers un album complet, plus abouti. C’est un peu comme un nouvel accouchement.
Les concerts de prévus alors ?
Il y en a 6 à venir dont 5 annoncés pour la fin 2024 (15/11 au BNR – Tournai/Belgique ; 16/11 pour le Warm-up du Daimonion Fest à la Brat Cave – Lille ; 30/11 au Garage Café – Cambrai ; 17/12 au Black Lab – Lille, 19/04/25 au Furious Cirkus - Lomme) et 1 surprise, à suivre !
En parlant de concert, le 16 novembre, vous partagez l’affiche avec plein d’autres groupes chouettes lors du Warm-up du 1er Daimonion Fest. Cédric, tu fais partie de l’organisation du Daimonion Fest à venir, peux-tu nous en dire quelques mots ?
Cédric : J’organise des concerts depuis 2007 avec Bataillon Thrash Nord et nous avons organisé plus d’une dizaine de concerts dans la région et l’asso a fini à la fin de Dusk and Darkness. Actuellement, j’ai envie de me concentrer sur un projet plus solide et plus centré sur mon style de prédilection qu’est le doom/sludge, avec une affiche cohérente dans ce style. C’est un style qui me tient à cœur vis-à-vis de mon histoire personnelle, où j’ai traversé plusieurs périodes de burnout ; et j’ai envie de me consacrer à des festivals qui sont dédiés à la prévention concernant la santé mentale. J’ai envie de réunir les gens qui ont connu ça et qui ont besoin de cette musique pour les aider. J’ai envie que ce festival offre un temps où les gens puissent vivre un moment de communion et de se faire porter par la musique. D’où ce projet.
Merci. Avez-vous un petit mot pour le public ?
Cédric, Franck & Marion : Satyam est content de revenir sur scène en tant que groupe après le drame que le groupe a vécu ensemble. Nous avons hâte de revenir et de rejouer. Nous vous proposons un nouveau morceau : "Anti-Chrysalis" lors des prochains concerts ; et pour décembre, très bientôt, un nouveau morceau verra le jour : "Once Upon A…" Alors restez à l’écoute !
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Les membres de Satyam se sont rencontrés et le groupe est constitué avec des humains qui s’entendent et qui partagent une vraie dynamique et de vraies valeurs humaines et musicales. Les membres de Satyam me font part, lors de l’interview, de la chance qu’ils ont d’avoir des personnes qui les aident dans le quotidien du groupe, des personnes qu’ils considèrent comme les membres du groupe tout entier. Cela leur tient à cœur de parler de l’ingé son Loulou (ingé son de profession, un vrai confort pour les musiciens pendant les répétitions, un ingé son qui comprend ce que souhaite le groupe permet d’avoir un beau son selon les différentes salles ; Loulou apporte un regard extérieur pour le son du groupe et les aide à s’y retrouver quand ils ont des doutes, etc.) et de la merchandiseuse Mélo (qui les accompagne sur chaque concert pour les aider à tenir le stand. C’est un vrai confort pour les musiciens car ils ne doivent pas se dépêcher de ranger la scène pour courir au merch après un concert ; ils ne doivent pas gérer la partie « commerciale » ; de plus, Mélo les aide aussi beaucoup dans la logistique des concerts). Mélo et Loulou font partie de l’équipe et les membres de Satyam ne tarissent pas d’éloges à leur encontre. Ils ont conscience qu’ils ont la chance de les avoir pour les aider pendant les concerts et dans leurs déplacements, ils font partie intégrante de Satyam. Les valeurs humaines que les membres du groupe partagent entre eux sont à l’image de leur musique : belles, profondes et généreuses.
Dee
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