Chronique | ESTATIC FEAR – A Sombre Dance (Album, 1999)


Estatic Fear ‎– A Sombre Dance (Album, 1999)

Tracklist :

01. Intro (Unisono Lute Instrumental) - 01:22
02. Chapter I - 05:03
03. Chapter II - 04:51
04. Chapter III - 03:33
05. Chapter IV - 10:31
06. Chapter V - 04:51
07. Chapter VI - 04:50
08.  Chapter VII - 04:52
09. Chapter VIII (Instrumental With Two Classical Guitars) - 03:16
10. Chapter IX - 06:22

Extrait à écouter :

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Cela fait un bout de temps que je souhaite parler de cet album. Second et dernier album d'un groupe, ou du projet d'un seul homme, Matthias Kogler, arrêté trop tôt, laissant ses fans dans un interminable deuil à en croire les nombreux groupes et pages Facebook dédiés à Estatic Fear ou à Matthias. En même temps, il y a de quoi ! Après un premier album magnifique, Somnium Obmutum, assaisonné avec un black/doom médiévalisant en 1994, Estatic Fear est revenu 5 ans après avec A Sombre Dance, plus abouti que le précédent, comme un voyage, une pérégrination nocturne remplie de poésie, laissant espérer d'autres compositions de ce genre, mais ce qui s'est passé fut tout l'inverse. Matthias Kogler ne donne plus signe de vie depuis cet album, rien ; aucun futur projet, aucune promesse, sans un mot, ni même un au revoir, c'était comme s'il s'était évaporé avec la pluie, dans la nuit de A Sombre Dance.

L'album démarre doucement au son du luth, comme pour inviter l'auditeur à franchir la lande et avancer dans la forêt autrichienne baignée dans un doux crépuscule. Tout est paisible dans la forêt d'automne, aussi paisible que la douce voix mélodieuse de Claudia Schöftner, les derniers rayons de lumière traversent les vapeurs de brouillard sur la lande, les lignes de guitare électrique viennent soutenir le luth, le chant growl intervient sur un ensemble d'harmonie plus épais, donnant à l'ensemble cet atmosphère mélancolique des crépuscules d'automne.

Puis viennent les éclairs, la pluie, les gouttes clapotissent au son de la flute et du piano. Ce dernier accompagne les gouttes de pluie et le voyageur sur le chemin qui devient de plus en plus sombre. Le duo des chanteurs de Mortus éclate comme un orage au milieu de la pluie, les lignes de guitare et la session rythmique deviennent dense comme la nuit, comme la végétation de la forêt croulant sous le poids de l'eau venant du ciel.

Le "Chapter III" redémarre au son du violoncelle et du luth, éthéré. L'atmosphère est redevenue paisible après l'orage. Le voyage continue ainsi à travers la nuit, sous l'ombre de la végétation de la forêt autrichienne, tantôt aérée, éthérée, comme une brise nocturne venant caresser le visage du voyageur, l'emmenant à tournoyer autour des arbres, à espérer suivre les ailes de quelques oiseaux nocturnes, flânant au dessus de la végétation, surveillant la forêt. Tantôt acérée comme des bourrasques, faisant voler les cheveux, les vêtements, mettant même à terre les voyageurs les plus fébriles, secouant les arbres et envoyant en fuite les animaux nocturnes.

Les mélodies remplies de souplesse et de poésie invitent à avancer toujours plus loin sur le chemin tapissé de feuilles mortes. Le piano tintinnabule comme la lumière des étoiles qui passe furtivement à travers les feuillages, la flute accompagne le violoncelle dans un fleuve aérien, agrémente ce voyage de douceur malgré la menace de la pluie qui reste dans l'air. Cet album est à prendre en entier, pas morceau par morceau ou chapitre par chapitre, malgré la setlist donnée à l'arrière de la pochette d'album. C'est l'exemple parfait du tout ou rien ! Tout l'album est comme un fleuve qui coule en rond, cyclique, hypnotique, tantôt légèrement, tantôt de façon effrénée et déchaînée avant de se replier, comme un dragon qui s'enroule en boule après avoir flotté dans les airs comme une tornade. C'est là que réside toute la beauté de cet album, les arrangements d'une richesse extraordinaire, mais les mélodies qui en sortent sont d'un naturel simplicité, aussi naturel que le vent, la pluie, aussi simple qu'un battement d'aile. L'ensemble est un condensé de poésie d'une passion tellement aérienne qu'elle semble disparaître dans les airs comme des petites étincelles.

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Dee Cooper


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