Ce nouvel opus est bien différent du dernier album du groupe
sorti en 2018, Skald, dans le sens où ce dernier se voulait une parenthèse dans la
carrière d’Einar Selvik. En effet les sonorités explorées étaient plus folk, plus traditionnelles,
l’artiste se mettant dans la peau d'un véritable scalde (ancien nom donné aux poètes scandinaves). Un album avec le moins d’effets
possible, un projet somme tout très minimaliste. Avec Kvitravn, nous revenons à un Wardruna plus « classique », dans le sens où la musique est
très épique, presque une bande-son de film, mais aussi très ritualiste. Le
nombre d’instruments traditionnels utilisés est impressionnant, notons le Kravik-lyre, le Trossingen-lyre, le Taglharpa,
le Langeleik, le Crwth, le Lur ou encore le Moraharpa.
"Synkverv" nous offre une belle entrée en matière mais c’est avec "Kvitravn", le titre éponyme de l’album, très puissant et rythmique avec ses voix hypnotiques, que l’on se replonge corps et âme dans l’univers de Wardruna. On y entend un corbeau croasser ; ce thème du corbeau, très récurrent, n’est pas choisi par hasard. En effet, selon Einar Selvik, le corbeau est son animal totémique et il était perçu comme l’intermédiaire entre le monde des hommes et celui des dieux. "Skugge" fait de suite penser au titre très connu "Helvegen" dans ses chœurs graves et ses sonorités. "Grá", plus dépouillé, sonne vraiment chamanique avec la voix de Lindy-Fay Hella qui se fait parfois haletante, parfois hurlante, toujours maîtrisée, nous rappelant combien la chanteuse apporte à ce projet depuis sa création en 2003.
"Fylgjutal" est un morceau épique et guerrier tout comme "Viseveiding"
et sa rythmique soutenue. "Munin", titre apaisant voire mélancolique, est un des
corbeaux messagers qui accompagnent le dieu Odin avec Hugin. Ces corbeaux parcourent
les neuf mondes et reviennent le lendemain pour rapporter au dieu ce
qu'ils ont vu et entendu. "Kvit Hjort" est très visuel, presque aérien, la corne
et le lur occupent une place de choix et on pourrait très bien entendre ce
morceau dans un film. "Vindavlarljod" bénéficie aussi de cette dimension fantastique
et puissante avec son riddim lancinant et sombre. "Ni" quant à lui, de part l’utilisation
de la flûte, a des sonorités plus médiévales.
"Andvevarljod", qui clôt l’album avec ses plus de dix minutes au compteur, est un morceau mystérieux et obscur. Le son des percussions ressemble à un marteau qui taperait sur une lame en train d’être forgée. Les chœurs sont hypnotiques, à la fois soutenus et éthérés. Einar semble chanter avec l’énergie du désespoir : sérieusement ce dernier titre est beau à en pleurer et je conseille même de le réécouter plusieurs fois pour en saisir toutes les subtilités.
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