Chronique | Marduk - Frontschwein (album, 2015)



Marduk - "Frontschwein" (2015)

Tracklist

01 - Frontschwein     03:13
02 - The Blond Best     04:26
03 - Afrika     04:00
04 - Wartheland     04:17
05 - Rope of Regret     03:52
06 - Between The Wolf-Packs     04:28
07 - Nebelwerfer     06:17
08 - Falaise : Cauldron Of Blood     04:58
09 - Doomsday Elite     08:11
10 - 503     05:12
11 - Thousand-Fold Death     03:45

Extrait


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Dienstende für den panzer

Il semblerait que le char d'assaut ait finalement perdu ses chenilles rouillées, disloquées à force de servir au même pilonnage belliqueux. Marduk, avec ses 23 ans d'existence, a apporté quelque chose à la scène Black des années 90, une furie explosive, un nouveau souffle à un Black devenu trop répétitif. Passé par plusieurs changements au sein de leur son, le groupe opère un virage serré à partir de "Panzer Division Marduk", un album où se mêle le Black le plus violent et la mesure d'un tempo Death dans un composé terriblement performant. Un parcours intéressant qui n'a eu de cesse de déboucher sur des albums uniques, fougueux, intenses, Legion et Mortuus très différents et pourtant aussi bons l'un que l'autre à différents niveaux. "Frontschwein", ou le vilain petit canard qui vient ternir le quotidien d'une famille parfaite.

Dans cet album, Marduk jongle beaucoup trop entre indécisions et assurance et se concentre malheureusement au final sur trop peu d'axes musicaux pour espérer éviter la redondance maladroite. La progression est bien le point d'ancrage qui débouche sur une sorte de minimalisme graduel. Quasiment tous les titres, à commencer par l'éponyme, s'articule autour de riffs pauvres et de blasts tellement agressifs et machinaux qu'ils en deviennent aussi expressifs qu'un nouveau-né passé à la moulinette électrique. Et ne parlons pas de "The Blond Beast", une cadence flasque au delà de toute espérance menée par une batterie dont les frappes s'apparentent presque à un beat.....électro ? Les frissons me parcourent l'échine à cette seule pensée interdite. Que s'est-il passé dans la tête de Fredrik Widigs au moment de la composition ? A moins qu'il ne se soit endormi en cours de route et que, dans l'urgence, le groupe ne pouvait pas rejouer le morceau et a donc créé un loop avec les 2 premières mesures de la batterie, que sais-je.

- "Euh dites les gars, c'est pas un peu chiant ce qu'on joue là ?"
- "Bon écoute Fredrik, t'es le ptit nouveau alors tu la mets en veilleuse et tu blast"

Les titres se poursuivent avec la même ligne directrice. Un bâchage de batterie sans queue ni tête, un Mortuus sans variations ni intensité accrocheuse, des riffs de guitares qui espèrent apporter un peu plus d'amplitude au bourdonnement incessant qui fait office de fanfare martiale, en vain. L'album dure beaucoup trop longtemps pour une intention trop faible, un sentiment de fatigue se profile à mesure que les morceaux s'enchaînent sans jamais proposer autre chose que les mêmes trémolos et blasts de batterie dénués de toute passion. Le démoniaque chanteur crie mais sa voix ne porte pas, trop engluée dans une saturation excessive, qui désacralise toute la portée infernale de son débit lent et menaçant.

La spontanéité qui mène Morgan à dominer son instrument dans des riffs acides est complètement diluée par un mixage au ras des pâquerettes. Les débuts de "Afrika" et "Between The Wolf-Packs", des promesses idéales qui se transforment rapidement en verre brisé par la bouillie sonore des autres instruments. La hauteur du son prédominant de la batterie vient couvrir de sa basse fréquence mesquine les guitares qui se retrouvent reléguées au rang de mélodies de fond presque inaudibles, alors forcées de se mélanger à la cacophonie générale dans des miséreux va-et-viens passifs.

Paradoxalement, "Frontschwein" se dote de quelques titres qui n'entrent pas dans la ligne de conduite principale de l'album. "Nebelwerfer", "Doomsday of Elite" et "503" sont infiniment plus lents, plus léthargiques. Le batteur abandonne pour un temps son syndrome parkinsonien pour assimiler un jeu plus en rythme avec Mortuus, plus limpide et surtout reposant après une jachère vulgairement tumultueuse. Le chanteur prend son temps pour déclamer ses paroles impies, préférant donner du corps aux silences entre les attaques de batterie et de guitares. Ce sont d'ailleurs bien les seuls morceaux où la batterie se désolidarise des guitares pour un résultat moins brouillon et surtout beaucoup plus voluptueux, grâce à cette modération inattendue (moins sur "Doomsday Elite"). C'est ainsi que ces trois morceaux, petits poches de résistances Blackened Doom, sont les plus substantiels de l'album car foncièrement différents du torrent discordant des autres titres. Triste constat pour un groupe ayant pour habitude de manier la sombre férocité à son paroxysme.

Considéré par certains comme la suite logique de "Panzer Division", le dernier album des suédois se répète beaucoup trop et échoue à faire continuer le groupe dans une excellence qui semblait jusque là incontestable.

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Kalhan




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