Interview du groupe d'Avantgarde Black Metal Terra Tenebrosa


Voici l'interview du trio occulte Suédois, Terra Tenebrosa. Elle fait suite à la chronique de leur second album "- The Purning -" que vous pouvez retrouver sur nos pages.


En premier lieu, comment présenteriez vous Terra Tenebrosa?

Terra Tenebrosa est une clique composée d’un coucou et de ses deux acolytes. Nous ne sommes que trois gars qui ont une passion pour la musique sombre et son imagerie ainsi qu’un désintérêt pour le monde qui nous entoure.


Après quelques recherches, j'ai découvert que votre nom vient de du Galicien. Pourquoi cette langue?

Je n’ai jamais entendu dire que c’était du Galicien. Certains disent que c’est du Portugais, d’autres que c’est de l’Italien, quant à moi je considère que c’est du Latin. En effet nous avons trouvé ce nom sur une carte de l’Enfer contenue d’un livre sur Dr Faust, et conclu que c’était bien latin. Quoiqu’il en soit, le terme correspond bien à notre musique, au monde autour de nous ainsi qu’aux mondes occultés dans nos propres psychés.


Certains des membres viennent du groupe Breach. Quelles expériences retenez-vous de ce premier groupe ?

Deux membres faisaient originellement partie de Breach. Ce groupe est un chapitre clos et notre porte de sortie a été de vendre un ou deux enregistrements de plus je suppose. Personnellement, avoir été dans Breach m’a appris beaucoup de choses sur la musique en dehors de cadres fixes, traduire des émotions et communiquer mon énergie dans la musique sans a priori et en essayant d’orienter les choses dans une certaine direction. Voilà ce que je peux retenir de ce projet. Mais ce projet, bien qu’il ait eu pour moi un certain impact, est maintenant enterré.




Quelles sont vos principales influences ? (En littérature, musique, cinéma…)

J’ai toujours été un fan d’horreur dans les films, les livres et les bandes dessinées. C’est quelque chose qui transparaît dans notre musique avec mon intérêt pour le chamanisme et la magie. Une grande partie du contenu lyrique tourne autour du thème des incursions dans les parties sombres de nos âmes, pendant lesquelles l’inspiration me vient.

Comment définiriez-vous votre style musical ?

Je ne peux pas vraiment. Je suppose que c’est du Metal, mais sur les nombreux sous-genres je n’ai que peu à dire. Les sentiments que nous voulons transmettre se communiquent plus facilement avec des guitares à distorsion, les parties ambiantes contribuent à faire ressembler cela à une bande sonore d’un film joué en notre esprit. C’est sombre, ambiant, et c’est du Metal. Mais je ne fais pas trop attention aux étiquettes.

Quels sont, à votre avis, les principaux changements entre « The Tunnels » et « The Purning » ?

Sur « The Tunnels » nous avons travaillé sur de petites variations toutes basées sur le même thème alors que dans « The Purging », les morceaux ont une une structure plus classique avec des refrains et des couplets distincts. Nous voulions que « The Tunnels » ait un côté monotone qui le fasse ressembler à une transe, mais pas faire le même album deux fois. Globalement « The Purging » a un rythme plus soutenu et nous avons déjà commencé à enregistrer le prochain opus qui sera encore une fois dans une autre veine. Il est difficile de dire à quoi il va ressembler mais il nous mettrons cette fois-ci plus l’accent sur la musique que sur le caractère ambiant.

Nous remarquons que chaque membre du groupe se cache derrière un masque, et ne savons même pas qui joue quoi. Pourquoi avez-vous choisi la position du mystère ?

Nous voulions être à l’image de notre musique. Etre debout juste en face de la caméra, portant des vêtements normaux priverait la musique de son côté délirant. Au départ je voyais plus ce groupe comme un projet d’art que des musiciens en chair et en os. Nous ne cherchons pas à être mystérieux, seulement en tant que personnes nous ne sommes pas intéressants. Ce sont les les personnages que nous dépeignons qui vont de pair avec la musique.

Pour aller plus loin dans le symbolisme, que représentent vos masques et costumes ?

Le masque du coucou est à l’effigie de quelque chose que j’ai vu dans mes rêves et mes visions et peut être considéré soit comme l’archetype de l’inconscient collectif soit comme une personnification de tout ce qui est mauvais et laid à l’intérieur de moi. Je suis incapable de confirmer l’une des deux thèses. Peut-être que c’est un moyen utilisé pour m’introduire dans les mondes obscurs. Quant aux autres, je n’ai jamais été aussi satisfait que pour les dessins originaux que j’ai réalisés à la hâte pour que nous gardions en tête l’uniforme, mais pour la couverture de « The Purging » je les ai transformés en gnomes, ils représentent ainsi les éléments de la Terre, les sombres territoires inexplorés de l’esprit.

Pourquoi avez-vous choisi de distribuer votre album en format vinyle ?

Je préfère le vinyle au CD. L’œuvre ressort toujours mieux et l’ensemble du produit semble plus authentique que le petit boîtier en plastique du CD. Le seul avantage du CD, c’est que vous n’avez pas à vous lever pour le retourner. Je ne m’inquiète pas beaucoup de la manière numérique de consommer la musique. Ce n’est tout simplement pas la même chose lorsque vous tenez un disque vinyle dans vos mains. Chaque fois que j’entends quelque chose que j’aime, j’essaye de l’obtenir dans ce format là si possible. L’inconvénient du format numérique est que vous jetez quelque chose au bout de trente secondes, et passez à autre chose car c’est facile à trouver. Quand vous achetez un album vous lui avez donné des chances auparavant, souvent il a même grandi en vous.



Mettons de côté l’aspect, et parlons de musique. Votre musique est pleine d’effets, comme la distorsion de la voix, les samplers… Pourquoi ce choix artistique ?

Je voulais que les voix sonnent inhumaines et possédées. C’est le personnage du coucou qui chante et je ne pouvais pas l’imaginer avec une voix humaine. Le coucou sort de l’obscurité et tente de trouver une voix, essayant de paraître humain, mais il n’y réussit pas tout à fait. Les samples sont là pour renforcer les émotions que nous essayons de traduire en musique. Lorsque vous essayez constamment de briser constamment les frontières entre conscient et inconscient, il peut en résulter une sorte de chaos, les samples reproduisent cela encore plus fortement dans nos compositions .




Pouvez-vous nous expliquer comment se passe la composition et l’enregistrement d’un tel travail personnel ?

Je dois être dans de bonnes conditions pour m’attaquer à la rédaction des paroles de Terra Tenebrosa. Si je me sens heureux ou simplement content, je ne peux simplement pas le faire. Il doit y avoir une certaine agitation au fond de moi pour avoir de la matière à composer quelque chose. Souvent, les idées me viennent par la privation de sommeil, la méditation, la prise de substances psychoactives et ainsi de suite. J’essaye de traduire en musique les sentiments que j’ai lors de ces moments. D’autres fois, la lecture d’une phrase dans un livre provoque un enchaînement de pensées qui mène à une émotion que je veux transmettre à la musique. Puisque nous avons notre propre studio, nous pouvons enregistrer chaque fois que nous le souhaitons, mais comme je l’ai dit nous devons être en condition pour le faire. Chaque fois que je me sens heureux, je me concentre plutôt sur la lecture ou je fais quelque chose qui n’a rien à voir avec ce projet. Et dans les moments où l’obscurité m’envahit, je me purge des émotions à travers la musique au lieu de tomber en dépression.

D’où vient ce désir de faire une telle musique « expérimentale », détonant avec le Metal extrême ?

Nous n’avons pas décidé de faire de l’expérimental. Tout ce qui survient, nous sentons que nous devons l’exprimer à travers la musiqueque nous cherchons à faire en utilisant tous les moyens nécessaires. Il n’y a pas de règle dans ce groupe. Le seul critère est de savoir si nous aimons ce que nous entendons.

Je n’ai jamais eu l’occasion de vous voir en concert, et je pense que nos lecteurs non plus. Pouvez-vous nous dire comment vous parvenez à mettre autant d’émotion en live que dans l’album ?

Terra Tenebrosa en direct et dans l’album sont deux choses légèrement différentes. En live, nous nous concentrons sur les morceaux les plus structurés. Il y a beaucoup de titres que nous ne pouvons interpréter à cause des nombreuses parties de chant et des samples. Nous nous refusons à utiliser des pistes d’accompagnement. Nous avons sélectionné les samples essentielles, celles que je peux contrôler sur scène. Quant à la voix, de nombreuses fois dans le disque, elle est plurielle : différentes voix se chevauchent, ce qu’il est également impossible à faire en concert. Nous jouons l’essentiel. D’autre part, les personnages s’animant devant le public créent une dimension supplémentaire au jeu scénique du groupe.

Enfin, quels sont vos projets pour l’avenir ? 

Nous sommes en cours d’enregistrement du prochain opus et prévoyons une longue tournée européenne pour cet hiver.


Interviewer: Morgan / Traducteur: Thomas


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