Chronique | SODOM - Persecution Mania (Album, 1987)

Sodom - Persecution Mania (Album, 1987)

Tracklist :

01. Nuclear Winter - 05:22
02. Electrocution - 03:11
03. Iron Fist (Motörhead cover) - 02:42
04. Persecution Mania - 03:36
05. Enchanted Land - 03:56
06. Procession to Golgatha - 02:00
07. Christ Passion - 06:10
08. Conjuration - 03:40
09. Bombenhagel - 05:04

Streaming intégral :

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L'année 1987 coïncide avec la "professionnalisation" de nombreuses formations de metal extrême qui ont largement contribué à poser les bases du futur death et black metal. Ce changement s'est particulièrement fait entendre chez des groupes comme Kreator, Destruction, Sepultura et Sodom, dont les sorties de 1987 se sont démarquées par une meilleure production, une exécution plus soignée (souvent grâce au recrutement de musiciens plus qualifiés) et une orientation thrash plus marquée, tout en laissant de côté le côté plus bestial post-venomien de leurs sorties de 1984-1986. Ce changement s'est ensuite confirmé au cours de la période 88-90, au cours de laquelle chacun des groupes mentionnés s'est associé à la vague du thrash Bay Area, tant dans leur style que dans leur son, s'éloignant ainsi davantage des tendances plus extrêmes et européennes de leurs débuts.

Si cette transition a été relativement progressive pour Kreator ou Sepultura, dont les albums Terrible Certainty et Schizophrenia peuvent être considérés comme des ponts entre les deux périodes, elle a été plus rapide pour Sodom. En effet, pour Sodom, l'année 1987 a marqué le début d'une nouvelle ère. Le groupe sortait d'un Obsessed By Cruelty (1986) particulièrement chaotique, musicalement avant-gardiste et crucial pour le développement du black metal, mais maladroit dans son exécution, ce qui l'a rendu peu convaincant. De plus, l'album avait souffert de conditions d'enregistrement désastreuses, d'une production médiocre et de changements fréquents de guitaristes.

À la fin de 1986, le duo Thomas "Angelripper" Such (basse) et Christian "Witchhunter" Dudek (batterie) a été rejoint par le guitariste Frank "Blackfire" Gosdzik. Ce nouveau trio a entrepris une sérieuse remise à niveau de sa musique. En termes de production, le groupe a fait appel à Harris Johns, l'un des grands noms du son metal allemand, déjà connu pour son travail avec Grave Digger, Helloween ou Kreator. C'était une garantie pour éviter les problèmes de l'album précédent. Sans remettre en question ses fondations heavy/speed et punk, le groupe a développé son propre style, déjà esquissé sur ses sorties précédentes, mais en s'appuyant sur une exécution nettement améliorée, ce qui a abouti à l'un de ses albums les plus marquants, Persecution Mania.

Bien que classé comme du thrash, l'album conserve de nombreuses caractéristiques pré-black/death de ses prédécesseurs, notamment le chant guttural, les quasi-blast beats et le riffage glacial et frénétique qui évoquent plus Obituary ou Darkthrone qu'Anthrax ou Metallica. En termes d'ambiance, l'album réussit là où "Obsessed By Cruelty" avait échoué, en créant un son à la fois caverneux et clair, suffisamment rugueux pour conserver une certaine bestialité, tout en mettant mieux en valeur les contributions de chaque musicien. On peut également noter une nette maturité dans les compositions, avec des riffs et des lignes vocales plus mémorables et efficaces qu'auparavant, bien qu'"After The Deluge" pointait déjà dans cette direction. Cela a permis à des titres tels que "Nuclear Winter", "Christ Passion", "Persecution Mania" ou "Bombenhagel" de devenir des classiques incontournables du répertoire du trio. Signalons également une excellente reprise d'"Iron Fist" de Motörhead, montrant que Sodom n'a pas oublié ses racines, reprise qui sera souvent jouée en concert.

Bien que Sodom se rapprochera davantage du thrash Bay Area sur l'album suivant Agent Orange (1989), le groupe ne déménagera pas en Californie comme le feront Kreator avec Extreme Aggression puis Coma Of Souls. Il préférera solliciter à nouveau Harris Johns et son emblématique studio berlinois Musiclab. Ce troisième album marquera définitivement le passage de Sodom dans la catégorie des ténors de son époque, une réalisation qui ne semblait pas évidente en 1986, à une époque où de nombreux autres groupes speed ou thrash entraient dans leur âge d'or.
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Mohamed Kaseb

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