Chronique | CRACKED MACHINE - The Call of the Void (Album, 2019)



Cracked Machine - The Call of the Void (Album, 2019)

Tracklist :

01. Jormungandr
02. Illuyanka 
03. Kirimu 
04. Yamata No Orochi 
05. Azi Dahaka 
06. Typhon 
07. Vritra


Streaming complet :

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Cette chronique est écrite totalement sur un coup de tête parce que j'ai pris une claque phénoménale en découvrant cet album. C'est un album mystique, d'une beauté époustouflante et ancré dans la mythologie, comme je les aime. 
 
Qu'on soit prévenu, c'est un album sur le mal, le mal primordial. Un mal qui habite le néant, néant qui vous appelle, qui vous aspire, tel est le message de prévention sur la couverture d'album : The Call of the Void - monstres et dragons de toute sorte vont être sujets ici. La production de Cracked Machine n'a pas de chant, juste la musique, mais c'est suffisant pour emmener l'auditeur dans un voyage hébété, le laissant avancer dans ce brouillard de fumée où il est confus, il ne peut même plus faire confiance à ses cinq sens. Et alors, la seule chose à faire, c'est de se laisser porter par ce fleuve hypnotique de musique, d'onduler comme les créatures peuplant ce monde sombre et laisser juste son cerveau s'avancer à tâtons en éveillant d'autres sens. En tout cas, c'est ce que le premier morceau vous suggère, et de toute façon, vous y êtes déjà plongé sans vous rendre compte au royaume de Jormungandr, fils de Loki, serpent des mers entourant le monde. 
 
Après "Jormungandr", "Illuyanka" vous accueille doucement, toujours de manière hypnotique avec une petite pluie fine, pluie qui tapote de ses notes de guitares afin de mieux vous préparer à l'orage, oui parce que Illuyanka est le dieu de l'orage de la mythologie hittite (2e millénaire av. J.C dans la région d'Anatolie). L’orage arrive doucement, avec les lignes de guitare pleines de douceur, on pourrait presque entendre le grondement sourd au loin. Ces deux morceaux qui s'enchaînent sont d'une beauté absolue dans la cour des boucles infinies. 
 
Le troisième morceau arrive avec une attaque de basse dynamique qui sera présente sur tout le morceau, indiquant qu'on est en pleine tempête, une tempête qui n'en finirait pas. La basse sera présente sur tout le morceau, soutenant des sonorités bien psychédéliques comme il faut, les lignes de claviers par-ci par-là donnent de la profondeur à ce morceau bien dynamique, on visualise une chasse à Kirimu, la créature chimérique de Final Fantasy, en pleine pluie battante et éclairs dans le ciel ! 
 
Si vous êtes encore là, c'est que vous êtes hypnotisés et que l'aventure de plus en plus profonde vers les entrailles du mal ne vous fait pas peur. Alors, allons-y donc. On garde le même cap, mais cette fois-ci beaucoup plus planant puisque ce morceau est consacré à Yamata No Orochi, le dragon asiatique maléfique à 8 têtes et 8 queues, cette bête menaçante pleine d'écaille et au corps de serpent planant dans les cieux. Pour eux, le ciel est une mer avec des îles de nuages, alors le groupe nous enrôle dans ce voyage aérien nocturne avec un jeu de guitare profond mais léger, à nous faire planer, encore et encore, enroulés dans les vapeurs nuageuses du royaume céleste. La musique est ondulante, comme ce long dragon qui serpente légèrement en fendant les airs. Toi, dans le fond, tire une dernière taf sur ton bédo et viens nous rejoindre car on va juste bouger un tout petit peu, vers la Perse pour continuer sur les mêmes cieux avec Azi Dahakar, le serpent à trois têtes maléfique de la Perse antique! Ce morceau peut très bien être la second partie du précédent tellement la structure harmonique est similaire : hypnotique, les lignes de guitare cajoleuses qui reposent sur la basse ronde et épaisse, soutenue par la batterie. L'ensemble est dynamique et aérien malgré quelques passages lents. 
 
Puis voilà qu'arrive Typhon, ce double serpent ailé grec, fils de Gaïa, titan des vents et des tempêtes, la lourdeur de la musique nous ramène vers les profondeurs, dans l’œil de la tempête, là où réside le noyau du mal avant de nous recracher par le bouche du typhon. La basse est très présente, comme une menace, comme ce calme de la nature avant la tempête des monstres tapissant dans l'ombre. Magistral. 
 
Mais la tempête se calme pour de vrai pour laisser place à Vritra, le dragon (ou serpent selon les écrits) védique de la sécheresse, car c'est lui qui obstrue la source d'eau des mondes. Il avance royalement dans le néant, rayonnant, repoussant les derniers obstacles que Typhon n'a pas emporté avec lui, tranquille comme le son de la guitare, comme son essence qui est l'inertie et la résistance. Son arrivée pour le dernier morceau de l'album est comme un message appelant au calme, de laisser au néant cette tranquillité et cette immobilité qui lui est propre, de redonner à ce puits sa profondeur primordiale. La musique se dilate, rampe, et habite toute l'espace et enfle comme une fleur qui s'épanouit sous les rayons de l'espace infini.
 
Et ainsi, tu as fini ton bédo, tu peux dormir tranquillement maintenant.
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Dee Cooper




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