Chronique | WAXSTAR - Motorbikes (Album, 2020)


Waxstar - Motorbikes (Album, 2020)

Tracklist :

01. White Anthem (Overture) - 01:32
02. The Project - 03:55
03. A Day In My Life - 03:02
04. Blood - 02:42
05. Pills - 02:50
06. Interlude - 01:30
07. Tesseract - 02:40
08. Vigipirate (feat. Shannon Chiles) - 03:24
09. Wind Blows - 03:04

Streaming intégral :


____________________________

Waxstar sort son second album Motorbike le 18 juin 2020 dans la plus grande confidentialité. Cette date symbolique marquée par la Résistance est-elle un choix ou un hasard, je l’ignore. 

L’album s’ouvre sur « White Anthem », un court morceau d’introduction enivrant qui monte en intensité par l’ajout progressif d’éléments, puis par une brutale déstructuration. Nous sommes directement plongés dans une ambiance assez industrielle et sombre. Les samples utilisés – radio brouillée, hélicoptère qui semble menacer et scruter ce qui se déroule au sol – rappellent les temps de guerre, dans un futur proche et dystopique. On pensera notamment aux émeutes, menant à la guerre civile, qui se déroulent dans le manga Akira. 

S’ensuit « The Project », un morceau assez dynamique, répétitif et changeant, avec des synthés mi-agressifs et mi-lancinants, qui nous hypnotisent avec leur effet de pompe. La basse rend l’ensemble plus « smooth », et me projette dans le corps d’un « cool kid » qui trainerait dans la rue avec sa bande, en faisant parfois des tours de motos et en tombant dans des embrouilles.

Après une courte introduction mélancolique et planante, une agréable surprise nous attend. On découvre, dans ce troisième morceau nommé « A Day In My Life », qu’il y une voix pour accompagner les instrus. L’ambiance est beaucoup plus triste que dans le précédant morceau ; le ton est presque résigné, la voix se fait d’abord un peu désincarnée, puis carrément robotique. Je me sens transportée dans un jeu vidéo indépendant en pixel-art, dans une ambiance grise, cyberpunk, où les lampadaires se reflèteraient dans les flaques de pluie. Je marcherais là, sans savoir où je vais. Avec l’absence de couleurs, toutes les rues semblent se ressembler. « Pale tones red skin / Wolf inside me / Brown eyes sad face / Look inside me » Les paroles semblent nous indiquer qu’il n’y a pas que des « tons pâles », mais aussi une « peau rouge ». Cela m’évoque le dessin de la pochette, sur fond rouge, qui rappelle le sang qui coule du nez du personnage. Celui-ci ouvre d’ailleurs son perfecto sur un T-shirt qui comporte un étrange logo et qui semble composé d’un triangle d’où coulent des trainées de sang vertes, oranges, rouges (majoritairement) et jaunes.

L’ambiance de « Blood » est plus industrielle et technologique. On se croirait maintenant dans un entrepôt-laboratoire scientifique. La voix a quelque chose de saisissant, d’effrayant, elle est aussi douce et sincère qu’elle semble désincarnée. Le titre du morceau « blood » est répété à de nombreuses reprises, avec un effet de delay qui sème la confusion. On se croirait cette fois, entre l’éveil et le sommeil, comme sous sédatif, cobaye d’une expérience médicale étrange. 

« Pills » se place dans la continuité du précédent morceau, on retrouve la même monotonie dans la voix, mais les synthés sont beaucoup plus dansants. Ils sont ponctués par de nombreux bruits percussifs parasites, qui semblent presque sortir du mix, remplissant l’espace. J’imagine un hall rempli d’enseignes à néon et d’écrans géants, où je me sentirais minuscule. « You need some drugs to save your soul / You need some drugs to save your life ». Les paroles rappellent la chanson précédente. Les médecins semblent forcer le cobaye à prendre des pilules. Celui-ci devient dépendant et en a besoin de toujours plus : « Want... more... ».

Un « interlude » intervient. Il s’agit d’un court morceau extrêmement épuré et planant, qui gagne en intensité. Cela semble symboliser une mort du cobaye en tant qu’individu. Il ne sera plus la même personne. 

C’est du moins ce que suggèrent les paroles du morceau suivant, nommé « Tesseract » : « Touch the darkness (night) / Touch your heart (night) / Feel the darkness From the night / Touch your heart (night) ». D’un point de vue musical, on dirait presque que le rock industriel de KMFDM a fusionné avec la new wave de Depeche Mode. Il y a un côté goth, presque EBM dans ces sonorités. La voix est assez spectrale, et les effets de tremolo sont particulièrement bien exploités (c’est un effet particulièrement important dans tout l’album d’ailleurs).  

J’ignore si c’est un clin d’œil ou non, mais le loop qui arrive juste après l’introduction de « Vigipirate » ressemble beaucoup à « Go » des Chemical Brothers. Notre morceau est un featuring avec Shannon Chiles, dont la voix efficace et dynamique colle parfaitement au style de l’album. Le chant semble toutefois un peu trop condensé à un moment, on a la sensation que les paroles auraient pu être réduites.

Le dernier morceau, « Wind Blows », uniquement instrumental, est particulièrement élégant. Il clôt à merveille l’album. Les mélodies, qui se promènent de haut en bas, sont entrainantes, charmantes. Le titre porte bien son nom, on entend la mélodie du souffle de l’air. Comme pour d’autres morceaux de l’album, on peut parfois regretter que ça se termine aussi brutalement, affaire de goût personnel j’imagine. 

Si on retrace l’histoire que raconte cet album, on réalise qu’elle correspond chronologiquement aux événements qui se passent dans Akira. Et pour avoir revu le film très récemment, j’en suis même certaine. C’est un bel hommage, qui résonne particulièrement bien avec ces temps difficiles. Il est possible que je fasse fausse route, mais la situation de Néo-Tokyo n’est pas très différente de celle de Taiwan, après tout.

____________________________

Iviche



Commentaires