Chronique de livre | Black Metal - Into the Abyss, Dayal Patterson (2018)


Black Metal - Into the Abyss, Dayal Patterson
(traduit de l'anglais par Emilien Nohaïc)

Camion Blanc s’est implanté comme une référence en matière de publications liées aux musiques extrêmes avec de nombreux ouvrages dont la qualité, il faut le dire, varie grandement d’un livre à l’autre. Il est bon de remettre dans son contexte celui qui nous intéresse aujourd’hui, la nouvelle parution de la série Black Metal Cult intitulée Black Metal – Into the Abyss. Fraîchement traduit de l’anglais par Emilien Nohaïc, que je remercie d’ailleurs pour l’exemplaire qui a atterri dans ma boîte aux lettres, ce pavé de 618 pages que nous offre Dayal Patterson diffère quelque peu des prédécesseurs de la série.

Nous sommes en effet face à un format plutôt original pour une publication de ce type car les 600 pages du livre sont intégralement des interviews retranscrites par l’auteur de groupes importants dans la scène Black Metal. Probablement nostalgique du fanzine Crypt que Dayal avait créé, il s’adonne ici à un regroupement de témoignages divers et variés de grands noms de la scène européenne avec une structure générale sensiblement similaire d’un article à l’autre : tout d’abord, une rétrospective de la carrière du groupe dont il est question du point de vue du musicien interviewé, puis la conversation fait route vers l’ambiance de la scène Black Metal de l’époque dans laquelle se situe le groupe en question. Enfin, les sujets religieux et politiques font souvent l’objet d’une ou deux questions.

Jusque-là, rien de bien original, rien de très différent de ce qu’on peut lire sur les nombreux fanzines et webzines existant, mais Dayal va au fond des choses avec des questions précises allant jusqu’au choix des membres des groupes, des techniques de studios choisies pour obtenir les sonorités, ou des questions très spécifiques sur l’ambiance de l’époque. Nous avons donc affaire à un ouvrage complet qui questionne des membres plus ou moins anciens de la scène Black Metal avec des questions précises qui amènent à des réflexions qui vont au-delà des banalités redondantes de nombreuses interviews. Qu’on se le dise, les personnes qui ont vécu dans la même génération que les musiciens questionnés n’apprendront peut-être pas grand-chose de nouveau, mais c’est une porte ouverte aux plus jeunes ou à ceux qui ont mis un pied tardif dans la scène Black Metal européenne pour mieux comprendre ce qu’il en était dans les années 90’ et début 2000. 

« Le secret du journalisme est simple, mais difficile à atteindre, il faut poser les bonnes questions aux bonnes personnes, et c'est exactement ce que ce livre fait. » S. (Blaze of Perdition) « Après la lecture de Black Metal : Evolution Of The Cult j'étais convaincu qu'il s'agissait du livre le plus important sur le sujet. Alors faire partie de ce nouveau volume est un honneur. Ce livre est un bienfait… ou un méfait ? » V'gandr (Helheim)

Voici la liste des groupes interviewés dans l'ouvrage :

- Helheim
- Urgehal
- Tsjuder
- 1349
- Vemod
- One Tail, one Head
- Koldbrann
- Mystifier
- Besatt
- Sacrilegium
- Black Altar
- Furia et MasseMord
- Mord’A’Stigmata
- Blaze of Perdition
- Loits
- Forgotten Woods
- Deinonychus
- Hypothermia
- Nocturnal Depression
- Trist
- Psychonaut 4

À chaque groupe, une trentaine de pages d’interview pour entrer, l’espace de quelques minutes, dans la tête du musicien en son temps et pour balayer la carrière musicale du groupe en question. Le format original plongera les plus anciens dans la nostalgie des fanzines, et permet également de ne pas se sentir obligé de lire le livre dans son intégralité. Les chapitres n’étant pas interconnectés, l’écriture facile sans être simplette, cela permet une lecture aisée et sans redondance dans les questions tant chaque interview a un caractère propre aux réponses données.

Extrait choisi : Présentation et questions à Loits, formation estonienne formée en 1996.

"Le seul groupe estonien à intégrer cette série, Loits, est un groupe fascinant. Il mélange une musique étonnamment accessible, aboutie et réellement artistique à des thèmes complexes et propices à la réflexion. Formé en 1996 et devenant vraiment actif quelques années plus tard, Loits a commencé à se faire connaître sur la scène locale à la fin du millénaire, grâce à leurs prestations scéniques. En effet, les membres n’avaient alors sorti qu’une seule démo cassette et un enregistrement d’une répétition.

En 2001 ils se lancent à l’assaut de l’international de manière plus officielle grâce à leur premier album autoproduit Ei Kahetse Midagi [Sans regret], qui se vend remarquablement bien et qui a été depuis réédité à plusieurs reprises par différents labels. C’est un ensemble musclé et bien tenu, où les morceaux sont pleins d’énergie et alternent entre les parties entraînantes et rapides, les passages mid-tempo sombres et grinçants, les refrains aux allures folk et un usage intelligent du synthé et de la guitare sèche. La source d’inspiration principale vient de Norvège, et la comparaison avec les débuts de Satyricon, Windir/Vreid, Taake et les débuts d’Ulver est permise, en plus de ceci il ne faut pas oublier un élément essentiel, qui est accentué par une production nette et sans bavure : les riffs et mélodies entraînants et entêtants.

En effet, le groupe a rapidement reconnu ses origines rock en adoptant le terme de « Flak n’ Roll » (qui est aussi le nom du label qu’ils ont créé pour la sortie de l’album) et cette dimension est encore plus évidente avec la suite de 2004, Vere Kutse Kohustab [Forcé par l’appel du sang]. Plus lent et méthodique que le premier album, avec des riffs plus larges, des passages plus profonds et des mélodies au synthétiseur plus entraînantes cet album a permis au groupe de toucher un plus large public grâce à des titres phares et aussi, d’une certaine manière, grâce aux photos des membres en uniforme de soldats estoniens de la seconde Guerre Mondiale. En réalité, et de manière un peu provocatrice, ce sont des uniformes allemands et les paroles traitent de cette période trouble durant laquelle les Estoniens se sont battus du côté des Allemands contre les Russes. Naturellement, (et peut-être avec justesse, étant donné le thème de la guerre), le groupe est pris dans des feux croisés, chez eux et à l’internationale, beaucoup pensant que le groupe s’était déclaré comme étant national socialiste, ce qui n’était pas impensable comme le NSBM a fait une percée au milieu des années 2000. Le groupe rejette ces accusations mais ne refuse pas pour autant le débat – parfois musclé – et poursuit son exploration de l’histoire de leur pays sur leur album suivant, sorti en 2007 : Must Album [Album noir].

Ce disque mémorable est peut-être le plus personnel et le plus audacieux à ce jour et sa construction offre beaucoup de variété, ce qui est d’autant plus marqué si l’on inclut les quatre chansons de l’EP Mustad Laulud [Chansons noires] qui accompagnent l’édition limitée. Les inspirations scandinaves étant moins pressantes, et offrant un black metal moins années 90, cet album renforce les influences rocks de Loits grâce à l’écriture des morceaux qui est plus mure et ouverte. Théâtrale, acerbe et souvent mélodique (le chant allant de parties  déclamées et chantées à des croassements dignes du vieux Abbath) et avec une dynamique impressionnante, l’album propose un black n’ roll parfois outrancier et rappelant Motörhead avec des compositions plus doom, doublées d’assauts tonitruants, des passages de folk metal sombres et un synthétiseur lent et poignant.

Depuis, le groupe n’est pas retourné en studio et il ne s’est pas produit sur scène depuis 2011. J’ai rencontré la première fois le groupe quand Lembetu, qui est à la tête du groupe, m’a écrit après la lecture de mon premier livre (la plus belle enveloppe que j’ai jamais reçue). Au milieu des années 2000, j’ai découvert l’existence de Loits et cette prise de contact m’a permis de m’enquérir davantage sur les sujets abordés dans les albums du groupe. Au final, nous avons beaucoup échangé sur l’histoire de l’Estonie avant de penser à faire un interview « officiel ». Le groupe fêtant ses 20 ans et faisant un retour après une longue période d’inactivité, le timing était parfait pour une discussion plus construite et approfondie.

Dayal : Dans Black Metal: Evolution of the Cult, les membres d’Europe Centrale et de l’Est comme Tormentor, Master’s Hammer et Graveland parlent des difficultés qu’ils ont dû surmonter en tant qu’amateurs et musiciens de metal, vivant sous le régime communiste ou contrôlé par les Soviétiques. Est-ce que c’est quelque chose que vous avez vécu aussi comme l’Estonie était occupée par l’Union Soviétique jusqu’en 1991 ? Est-ce que c’était compliqué pour toi de connaître des groupes de metal et de metal extrême en grandissant ?

Lembetu : Tout d’abord il faut préciser que le communisme (en fait le socialisme) en Hongrie et en Tchéquie était différent de celui de l’Union Soviétique. Ces pays s’en sont mieux sortis que les républiques de l’URSS, à la fois économiquement et du point de vue des libertés individuelles. Pour nous, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Yougoslavie etc. étaient des pays européens développés. Et pourtant, l’Estonie était dans une position plus favorable que les autres républiques soviétiques. Notre position géographique a fait que nous étions en première ligne de la propagande de guerre. Et comme l’URSS et la Finlande avaient une relation particulière, on bénéficiait d’un échange culturel limité. Comme je lisais l’interview de Graveland de Black Metal: Evolution of the Cult, il me semble que dans les dernières heures de l’Union Soviétique, et après, nous n’étions pas les plus à plaindre. Je pense aussi que Rob a un peu noirci le tableau car j’ai visité la Pologne alors que Graveland en était à ses débuts.

Le Rideau de Fer ne pouvait pas retenir la culture. Certes, les formats physiques comme les cassettes et les vinyles ne passaient pas facilement, mais pour les ondes radios ou la télé c’était autre chose. On pouvait regarder la télévision finlandaise et écouter des chaînes de radios de Finlande et d’autres pays de l’Ouest. Quand la musique a changé, ça a été pareil pour nous aussi. Quand les premiers accords de heavy metal ont résonné à l’étranger et sont passés à la radio dans les années 80, les premiers groupes de heavy metal se sont formés ici aussi. Et quand le metal est devenu plus extrême, ça a aussi été le cas pour nous. Les moyens pour créer, jouer et sortir de la musique étaient limités mais les gens étaient actifs et quand le Rideau  de fer est tombé, davantage de groupes toujours plus heavy sont apparus. Le barrage a éclaté, et certains groupes se sont faits connaître lors de tournées et en sortant des albums un peu partout dans l’URSS. L’Estonie avait déjà regagné son indépendance quand nos premiers groupes sont apparus et malgré une situation économique désastreuse, nous nous en sommes sortis avec le sourire. En ce sens, nos premiers pas dans la musique ne sont pas bien différents de nos partenaires de l’ouest, les jeunes musiciens ne roulent jamais sur l’or. J’ai trouvé de nombreux points communs avec les premières années de Mayhem.

[...]

D’où vient le nom Loits ?

On peut le traduire par « chant », « sort » ou « incantation ». On hésitait entre d’autres noms au début, comme « Mardus » (une obscure créature de la mythologie estonienne) ou Varangus (« dans la forêt profonde et sombre »), mais nous nous sommes arrêtés sur Loits comme il est plus simple et universel. J’aime m’imaginer que  nos chansons sont des sorts gravés dans les runes qui donnent pouvoir et courage au combat, aux rares qui les ont étudiées.

Tu parles de l’émergence du pagan black metal comme un mouvement en Estonie. Est-ce que tu considérais Loits comme faisant partie de ce mouvement, et si oui, quel sens donnes-tu à cette expression ?

Oui, on appelait ça « pagan » ou païen, mais on prenait les choses différemment que les autres groupes. Nous avons dès le début écrit des paroles sur les faits historiques plutôt que ce pseudo romanticisme fait d’épées et de loups. A l’époque, nous étions fortement influencés par le livre de notre Président Lennart Meri Hõbevalgem dans lequel il explique (grâce aux découvertes archéologiques, à des expériences scientifiques et aux vieilles sagas et chansons) à quel point nous étions liés à la Scandinavie et au reste de l’Europe depuis des siècles. Principalement, les voyages de Pythéas de Marseille à l’île estonienne de Saaremaa au quatrième siècle avant notre ère, l’Ultima Thulé et par-dessus tout, le grand impact de la météorite dans le village de Kaalli à Saaremaa et comment elle a influencé la mythologie locale, en Scandinavie et dans le reste de l’Europe. Ces thèmes sont devenus la base de notre fierté nationale. Hõbevalgem était un peu notre bible païenne.
[Comme ce sont des sujets peu communs, il est peut-être nécessaire d’apporter davantage d’explication. Pour ceux qui ne le savent pas « Ultima Thulé » fait référence à un endroit septentrional mystérieux découvert par l’explorateur grec Pythéas il y a environ deux millénaires. Les coordonnées exactes sont toujours sujettes à débat. Certains pensent qu’il s’agit de l’île estonienne de Saaremaa alors que d’autres pensent qu’il s’agit plus de la Norvège, de l’Islande ou même du nord de la Grande-Bretagne. Ce qui est toutefois certain, c’est qu’un village de Saaremaa s’appelle Kaali et a été frappé par une météorite il y a 4000 ans et cet événement aurait influencé la mythologie locale, autant que le paysage. Aujourd’hui, il y a un lac à cet endroit.]

Certains lecteurs vont avoir du mal à comprendre en quoi les écrits de Lennart Meri et l’histoire de ton pays sont si importants dans ce contexte. Comme une bonne partie de ta musique et de ton art fait référence à l’histoire de l’Estonie, je me demandais si tu pouvais nous faire un rappel des relations que l’Estonie entretient avec ses voisins et en quoi ceci est lié à Loits ?

Mon cher Dayal, on pourrait écrire tout un livre ! [rires] Comment faire simple ? Ce n’est pas évident. Tout d’abord, il faut nous retrouver sur une carte. Ce petit coin de terre et ses 1,3 millions d’habitants, entre la Suède, la Finlande, la Russie et la Lettonie. Nous avons notre propre pays, notre propre langue et culture. C’est déjà un petit miracle, n’est-ce pas ?

J’ai vécu près de la moitié de ma vie sous le régime soviétique, et la révolution punk et heavy metal a été un combat pour la liberté. Un rempart contre l’oppression. Je pense que nous avons poursuivi là où les groupes plus anciens s’étaient arrêtés. Plus radical, plus sérieux. Nous avons creusé les histoires et évènements enfouis dont les gens n’osaient toujours pas parler. Cette fierté nationale était assez courante quand nous avons fait notre révolution en chanson ; un combat sans effusion de sang, ou  presque, qui nous a redonné notre indépendance. Notre nation est petite. Je pense qu’une petite dose de fierté nationale coule dans les veines de chaque Estonien et ça nous a maintenu en vie quand toutes les nations finno-ougriennes autour de nous ont disparu. Elles ont été avalées par les autres peuples.

Je vais te résumer brièvement l’histoire de l’Estonie. Les peuplements sont devenus possible à la fin de l’ère glaciaire, il y a 11, 000 à 13, 000 ans. On ne sait pas qui exactement s’est installé ici ni d’où ils venaient. Une des premières mentions, pour ne pas dire la première, du quotidien de cette région vient du géographe et explorateur Pythéas. Son travail remonte à 2 300 ans et il décrit les habitations, les habitudes, les outils, l’économie locale de cette région. Jusqu’au début du siècle suivant, les choses étaient sensiblement les mêmes. On trouvait de l’ambre sur les côtes, ce qui avait beaucoup de valeur pour les Romains, et déjà à l’époque, il y avait du commerce avec Rome. C’est la première fois que nous apparaissions sur une carte. Nous n’étions pas un pays uni à l’époque, mais les tribus partageaient une langue et une culture commune, et des valeurs économiques.

Un peu moins de mille ans plus tard, les tribus locales étaient en pleine forme. Le pays était structuré, nous avions nos propres rois, etc. L’Estonie jouissait d’une position commerciale idéale au temps des Vikings, toutes les routes commerciales importantes allant de la Scandinavie à Byzance passaient par l’Estonie, nos ancêtres étaient bénis des dieux. Certes, il y avait les Vikings. Les Russes n’avaient pas encore atteint la frontière est. Mais ces « conditions idéales » n’ont pas duré. D’autres pays avec une armée plus importante et un pouvoir mercantile ont commencé à s’intéresser à notre pays.

D’abord le Danemark a conquis la partie nord de l’Estonie au 12e siècle et peu de temps après la Croisade Livonienne s’est emparée du sud du pays. C’était notre dernière chance de nous battre contre des envahisseurs en tant que pays libre pendant des siècles. C’est peut-être une question de point de vue de savoir si l’Estonie était un pays uni ou une mosaïque de tribus, mais il est certain que le roi Lembitu a réussi à unifier ces tribus en une grande armée. Même si les forces estoniennes ont eu du succès, ce n’était qu’une question de temps avant la défaite et la mort du roi. La dernière vraie tentative de libération de l’Estonie des oppresseurs a été de 1343 à 1345, après que plusieurs pays envahisseurs aient contrôlé le pays (Danemark, Suède, Pologne, Russie… même la Lituanie). Mais il ne faut pas voir ces 700 années comme de l’esclavage. La plupart du temps nos ancêtres ont réussi à conserver leur statut et les guerriers estoniens se battaient souvent du côté qu’ils jugeaient le plus profitable. Et arrive le 20e siècle et la première Guerre Mondiale. Ça a été l’occasion pour nos arrière-grands-parents de se battre contre les Russes et les Allemands pour libérer à nouveau l’Estonie. A nouveau, la liberté n’a été que de courte durée, en 1939, la Russie occupait le pays, puis ce fut le tour des Allemands et enfin des Russes. Mais je pense que nous allons aborder ces questions sous peu…

Effectivement. Cet intérêt pour l’histoire de ton pays et plus particulièrement pour l’histoire récente, est au cœur du projet de Loits dès le premier album de 2001, Ei Kahetse Midagi. Vous étiez tout de même actifs avant avec la sortie de démos de répétitions et une compilation, est-ce que le concept était différent à  vos débuts ? Et à propos de Ei Kahetse Midagi, la pochette est plutôt originale, quel est le concept derrière cette image et l’album en général ?

Nous étions plus centrés sur la mythologie et notre passé païen entre 1996 et 1999, mais le groupe était moins actif alors, et nous ne voulions pas prendre le même chemin que les groupes de metal païen de l’époque. Il y avait suffisamment de Tharaphitas. Nous avons préféré rechercher nos racines et avons découvert des faits importants et des thèmes dont personne ne voulait parler ouvertement, ce qui nous a agacés. L’infirmière de la pochette est celle qui s’occupe des malades mentaux du pays. Ce symbole particulier a depuis accompagné Loits. Le temps de la convalescence après l’oppression est long et je pense qu’il est toujours en cours. D’un autre côté, l’oppression de longue date nous a donné la capacité de ne pas suivre tout ce qui est nouveau, d’être suspicieux et de survivre dans des conditions difficiles, de toujours trouver une solution à ce qui nous arrive.

Quelles étaient les principales sources d’inspiration pendant cette période et comment se passait le processus d’écriture des morceaux au sein du groupe ? 

Avant de répondre à ta question, je dois faire un point sur la situation de la scène. Au milieu des années 90, quand la scène locale de death metal a dépéri, la nouvelle génération de pagan black metal a pris le dessus d’autant plus rapidement. Les gens partageaient la même attitude, avaient le même âge et le même état d’esprit et le même enthousiasme. C’était une sorte de cercle black metal naturel sans identité, et au début, tout le monde jouait dans les autres groupes des potes. Il devait y avoir une dizaine de groupes, et autant de membres. Loits ne faisait pas exception. C’est moi qui ai écrit la musique de la démo et du premier album Ei Kahetse Midagi. Les paroles ont été écrites par le bassiste M. Divine et moi. Notre amitié est ce qui pousse le groupe. L’album suivant a été composé comme un groupe : moi, M. Divine et le guitariste Gates avons contribué dans les mêmes proportions. La scène était profondément influencée par la seconde vague de black metal surtout par la musique et l’idéologie de Scandinavie. Mais comme je te le disais, je pense que la première démo de Tharaphita a été la première étincelle qui a allumé le grand feu. Bathory a facilité la découverte de cette seconde vague. Puis les conflits entre Burzum et Mayhem ont attisé le feu, mais les raisons principales à la fondation de Loits sont Satyricon, Isengard, Ulver, Fleurety, In The Woods… et Ved Buens Ende. Ces groupes comptaient beaucoup pour moi, c’est toujours le cas d’ailleurs."


Extrait de l'interview de Loits, pages 397-402 [...] 406-414.
Avec l'aimable autorisation de Camion Blanc & Emilien Nohaïc.

Dayal Patterson
Black Metal – Into the Abyss
(traduit de l'anglais par Emilien Nohaïc)
paru le 24 avril 2018
Camion Blanc - 618 pages
38€

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W.G.

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