Chronique | BEORN'S HALL - Estuary (Album, 2018)


BEORN'S HALL - Estuary (Album, 2018)

Tracklist :

01. Introduction 
02. Dark Wood-Black Marsh 
03. Estuary
04. Blood for Wotan 
05. The Nurturing Soil
06. Call to Ravens 
07. I Know You Rider
08. New Hampshire Rain
09. Roads Go On Forever

Streaming intégral :

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Sortis de presque nulle part en 2016 et originaires du New-Hampshire (US), Vulcan et Rognvaldr donnent l'impulsion créatrice à Beorn's Hall qui alors germe, et surgissant de la terre, voit le jour avec le premier album Mountain Hymns en 2017. Je me tiens là aujourd'hui pour tenter de retranscrire mon ressenti quant à l'écoute du second opus sorti récemment, une relique du nom de Estuary,  et toujours sur le label allemand Naturmacht Productions, spécialisé dans le black atmosphérique empreint d'une approche "pagan" et authentique de la musique. L'oeuvre 'In The Mountains' servant d'artwork, réalisée par Albert Bierstadt en 1867 est splendide, notons le, et s’inscrit parfaitement dans le type de musique proposé. Il me rappellera immanquablement celui de The Howling Mountains de Hermóðr, ainsi que ceux de Saor et plus récemment Can Bardd où les groupes mettent sévèrement l'emphase sur la solennelle majesté des panoramas et de la nature.

Nous sommes introduits à l'univers de Beorn's Hall sur des effusions de percussions et de cornes de brumes, ma foi, ce n'est pas forcément surprenant, mais moi ça me fait toujours quelque chose, et ça fonctionne indubitablement, notamment grâce à la transition avec le premier morceau 'Dark Wood Black Marsch' qui est probablement le plus raw et méchant de l'album, instrumentalement et vocalement. Ce morceau s'initie par un impact frontal avant de devenir de plus en plus mélodique, permettant l'intégration de chœurs, de synthé et de guitare acoustique, jouée par Rognvaldr qui exerce aussi son talent à la mandoline. J'adore 'Estuary'', le titre éponyme, avec son introduction faite de cuivres et de percussions au synthétiseur, dont la sonorité old school voire "cheap" me rappelle les mets les plus croustillants de l'epic black metal et du dungeon synth. C'est sans compter sur la puissance du premier riff, typiquement hérité d'un black metal des années 90's qui fait "UGH" et dont les temps sont marqués par une cloche résonnante, relativement discrète. Un morceau assez brut qui me remettra un peu en mémoire des passages du premier album des américains. 'Blood For Wotan', rien que ça. La guitare acoustique retentit, puis vient la voix de Vulcan, douce et très proche de ce qu'on peut entendre dans le Neofolk / Dark folk, flagrant avec l'utilisation de l'instrument susnommé. Dans la seconde partie du morceau vient le moment le plus mémorable de l'album, une rythmique très punk enfonce les lignes qui vous servent de défense contre l'étonnement. Puis des chœurs hauts et fiers résonnent dans les grands espaces que nous offrent la maison des combattants valeureux.

La moitié du voyage se marque par 'The Nurturing Soil', la terre nourricière, avec un sample d'homme creusant la terre de sa pelle, à la recherche de toujours plus de de lien avec le sol, la nature, l'endroit où les choses poussent, meurent, renaissent, se développent, s'embellissent... Une piste écrasante, avec des passages alternants entre un chant haut perché et les mugissements de l'âme. Ici, la terre nourricière passe par beaucoup d'états émotionnels. Les corbeaux arrivent, peut-être les messagers de Wotan, et on retrouve ces sonorités très "folk" et la grandeur de la période "Viking Metal" de Bathory, une mention que j'appliquerais à tout l'album, en fait. Apparemment, 'I Know You Rider' est l'adaptation d'une "american prison song" dans le style de Judy Roderick, très américain et résolument bluesy. L'apparition de ce titre parmi les autres est une surprise pas si surprenante que ça, au final ... tant elle s'accorde bien au cœur de cette tracklist. Le duo nous contera alors quelque chose de plus personnel et intime avec 'New Hampshire Rain', faisant directement référence au lieu de vie des artistes, grandiose. Estuary se clôt sur 'Roads Go On Forever', un titre enthousiasmant et ma foi très entêtant, introduit par un long sample de Michael Cook déclamant des textes, donnant un aspect narratif à la chose. Concernant M.Cook, à en croire mes recherches, il s'agît là d'un dramaturge canadien décédé à la fin du siècle dernier.

Beorn's Hall ne fait pas vraiment dans la nouveauté, mais parvient à assembler quelque chose de puissant et revigorant avec de vieux ingrédients ayant fait leurs preuves. L'utilisation d'instruments acoustiques apporte véritablement un plus à l'album, avec comme je l'avais évoqué, des passages quasiment Neofolk ou rappelant la musique américaine plus "traditionnelle" et champêtre. Ceci insuffle alors vie et force à un album à deux visages, dans l'ensemble très solennel et porté sur l'épique, et dans une seconde lecture beaucoup plus intimiste et personnel, donnant à la musique une particularité propre. Le traitement du son est tout bonnement génial, il est brut, rugueux, avec son grain et orné de ses impuretés enchanteresses. Des chœurs, il y a des chœurs partout, puissants, guerriers, touchants .. la voix est un formidable instrument, capable de rendre sous leur forme la plus pure bien des émotions, nous en avons un bel exemple ici. Odin exige des offrandes de sang et Beorn's Hall lui offre un album qui fera bouillir le sang des braves, se jetant ainsi dans la mêlée, tandis que ces airs d'un autre temps résonneront encore longtemps sur les champs de bataille, et dans les vastes Halls dorés du Valhalla.
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Stuurm


Beorn's Hall :

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