Live report | Chameleons Vox @ Bus Palladium, 20 avril 2016



 Il est 13h40, la voix dans le micro grésille, invitant les accompagnateurs sans billets à bien vouloir descendre du train. Dehors c'est la grisaille. Vite oubliée la journée de la veille. Brest est redevenue elle-même. Reste juste un vent étrangement chaud, un dernier reliquat d'un éphémère passé. Journée maussade donc. 13h45, le train démarre. La voiture est vide et j'ai le cœur lourd. Mauvaises pensées, mauvaise nuit. Tous les ingrédients sont réunis pour une bonne soirée goth. J'aime les clichés, ils sont si amusants. Le paysage défile et mes idées également. Rêves d'un ailleurs, espoir de la rencontrer. Je saurais que c'est la bonne au premier regard, je resterais hypnotisé, sans voix.


 Chameleons Vox. La « Voix » justement, rajouté au nom de ce groupe culte, est là pour nous signifier qu'il ne s'agit pas de la formation d'origine. Plus je regarde le flyer représentant le logotype du groupe, avec cette tête stylisée, et plus je deviens mélancolique. Le reste de la journée semble s’effacer. Je me retrouve donc au Bus Palladium, il est déjà 21h30. J'ai l'impression d'avoir été avalé par le vortex du temps lui même. Bon, loin de devenir le Grand Méchant Loup (comprenne la référence qui pourra), je me suis retrouvé sans défense, comme un fragile agneau, totalement désorienté, parmi un public assez hétéroclite.

 Des habitués, de nouvelles têtes, du beau monde comme mrlamort (Nova & Vetera) et Andy Julia (Soror Dolorosa), ainsi que des gens pas vraiment issus du milieu goth. Il y avait de tout. J'explique cela par la direction plutôt « pop » du groupe qui va se produire dans quelques minutes, une direction musicale plus ouverte, moins élitiste peut être même, dans tous les cas, attirant un public extérieur aux habitués du gros post-punk qui tache. Avant toute chose, je vais vous prévenir que je ne suis pas fan des Chameleons, je ne l'ai jamais été et ne le serais probablement jamais. Désolé, mais je préfère être franc et expliquer dans la foulée le manque de longueur de ce report.




 En guise de première partie, la prestation habituelle. Cette fois-ci, Le Boucanier nous a dégoté Mike Garcia, un artiste performeur utilisant moult laser et effet pyrotechniques. Feux d'artifices dans le dos, lasers au bout des doigts, ce dernier s'est présenté au son d'un electro-indus martial, habillé façon Sam Fischer de Splinter Cell, comme une créature cyberhybride. Un show très visuel entre étincelles, limaille de fer incandescente projeté sur un public euphorique, pétarades et jeux de lumière. Très visuel certes, mais je l'avoue, je me suis ennuyé. En même temps j'ai déjà vu Punish Yourself qui m'avait proposé sur scène le même genre d'artifices en bien plus poussé, plus violent.





 À l'heure des Chameleons Vox, c'est une véritable marée humaine qui s'est précipité vers la scène. Je n'avais pas vu la salle aussi remplie depuis le concert de Christian Death. Et moi, quand je suis coincé comme cela, ça ne va pas. Cette claustrophobie augmentée par un public peu sympathique, j'y reviendrai, ne m'a pas du tout aidé à rentrer dans le concert. J'ai quand même de bonnes choses à dire sur le groupe, n'ayez crainte, car dans l'ensemble, les membres des Chameleons ont été bons, je n'irais pas dire le contraire, et bon nombre de gens ont apprécié, voire plus.





 La formation est donc plus « pop » que ce que j'ai l'habitude d'écouter. La voix de Mark Burgess était juste, accompagnée de ce qu'il faut d'effet, ni trop, ni trop peu. Musicalement rien à redire, c'est propre, net. La distorsion sur la voix est amené de la bonne manière, le tout permettant une bonne introspection. La basse est bien présente et donne l'élan nécessaire sur lequel les autres instruments se greffent. La batterie est à un niveau sonore juste, ni trop, ni trop peu. La guitare virevolte et nous entraine avec enchantement.

 Les titres sont mélodiques mais savent tout de même rester énergiques. J'ai retrouvé quelques intonations faisant indiscutablement penser à The Cure, Joy Division, Jesus And Mary Chain, Echo And The Bunnymen, etc...





 Le groupe a fait montre de peu de jeu de scène. En même temps ce n'était pas vraiment le propos. Ajoutez à cela une interprétation des titres phares, et une reprise de « Transmission » de Joy Division et vous avez l'impression que le groupe n'a fait que le minimum syndical. Il n'en est rien. Il y avait de l'empathie, des sensations, d'émotion, de ressenti. Le show fut court, et pour être encore une fois franc, j'en fut grandement soulagé. Pourquoi ? Parce que pendant ce concert, le Bus Palladium s'est transformé en temple de la fragilité.





 Je m'explique. Un public hétéroclite, une marée humaine, des gens euphoriques. Mettez cela dans une petite salle, secouez le tout et ajoutez une pointe d'irrespect et vous obtiendrez un cocktail explosif. Du pogo. Les gens, sérieusement ? Du pogo sur du Chameleons, et pourquoi pas du pogo sur du Chopin, du Kraftwerk ou du Sopor Aeternus pendant que l'on y est ? Il n'y a qu'en soirée goth sur Paris que j'ai vu ça. Déjà se faire bousculer et envoyer du premier au vingtième rang... « Placement libre » qu'on me crie. Certes, mais le respect ça existe aussi, surtout quand on est serrés comme des sardines. On me dit dans l'oreillette que non.





 L'euphorie ne pardonne pas tout. Qui pour payer les factures des mes côtes cassées ? Je fais 50kg tout mouillé, problèmes articulaires, on me traite de fiotte, mais zut, j'ai encaissé les coups, les tirages de cheveux, les gens qui vous poussent dans le pogo et les insultes sans broncher. Au centre ça s'énerve sévère, limite à se mettre sur la gueule... À six ou sept seulement en plus... Pas sûr que les plus fragiles sont ceux à qui on pense... J'ai eu moins de problèmes avec le public de Korpiklaani, c'est dire. Désolé pour mes amis qui y étaient, au centre justement, mais la prochaine fois j'opte pour l'euthanasie automatique de tous ceux qui se mette à pogoter.

 Une fois le concert fini, la salle se vide... Juste une dizaine de personnes à 2h... Probablement le fait que beaucoup s'en vont travailler le matin même, que d'autre sont trop fatigués, ou que le DJ de cette soirée, le même que celui de la soirée après Skeletal Family, ne soit vraiment pas bon. Et ce n'est pas que moi qui le dis. Désolé pour lui. N'en pouvant plus, moi aussi j'ai pris mes jambes à mon cou.

 Je reviendrai, bien évidemment, car une mauvaise expérience ne doit pas vous gâcher les autres. Quand je repense au concert des Sex Gang Children, je me dis qu'il n'y a pas de raison qu'une telle soirée ne se reproduise. Je ne vais donc pas enfoncer plus le clou et je vous le redis à tous, ce n'est que partie remise. J'en suis persuadé.


Report : Aladiah
Photos : Unkle Z. Photography


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