Chronique | Altarage: Nihl (2016)


Altarage - "Nihl" (album, 2016)

Tracklist:

01. Drevicet
02. Womborous
03. Graehence
04. Baptism Nihl
05. Vortex Pyramid
06. Batherex
07. Altars
08. Cultus

Extrait à écouter: 'Womborous'



_____________________________
 
 "Aujourd’hui nous allons voyager en Espagne, une contrée qui n’est pas forcément connue pour sa scène Metal Extrême et à tort ! Teitanblood, Proclamation, Primigenium pour ne citer qu’eux… Ce serait une erreur de croire que ce pays ne dédie sa vie qu’au foot, à la corrida et à la fiesta. Après que les basques d’Altarage nous ont délivrés une première demo prometteuse ayant tapé dans l’œil avisé des amateurs de Death/Black Metal, ils nous reviennent avec un premier opus. La formation arrivait de nulle part, comme échappée d’une brèche terrestre laissant ressurgir les enfers sur terre. Ce côté mystérieux (line-up inconnu, musiciens cachés) etc… me laissait croire que c’était un énième groupe surfant sur une vague à la mode, et au final ça ne reste que des détails, non? Souvent utilisés pour cacher un manque de talent certain, Altarage lui, doit le faire pour d’autres raisons, car je vous assure que ça n’est pas dû au manque de talent, loin de là. Vous reconnaîtrez certaines influences musicales dont je fais étale plus bas si vous êtes attentifs, mais "influence" ne signifie pas nécessairement "plagiat", là, il serait plutôt question d'inspiration. Le groupe aura su les digérer afin de nous offrir une œuvre personnelle.
Et forcément, qui se colle à la sortie de cet album ? Iron Bonehead ! 


La formation ibérique nous revient en ce début 2016 avec son premier attentat sonore qu’est Nihl. On va jouer cartes sur table retirer toute forme de suspens. Cet album est une merveille. Le potentiel décelé sur « MMXV » vient de faire ses preuves. Trente-six minutes, c’est le temps qu’il faudra à Altarage pour vous annihiler. La première chose qui m’a marqué sur cet album est l’intensité qui s’en dégage, tant dans le son que dans l’atmosphère d’une opulente opacité. On ressent une réelle oppression à l’écoute de ces riffs qui vous donnent l’impression de suffoquer, de vous retirer toute forme d’oxygène. Il est vrai qu’au premier abord leur son et manière de composer peuvent faire penser à Bölzer, Dead Congregation et principalement Portal, mais ce serait une erreur monumentale de croire que le groupe n’est qu’un pâle clone de la formation australienne. Ce qui marque la grosse différence justement est ce chant qui se retrouve comme emprisonné dans le son des guitares, un chant fantomatique. Il donne l’impression d’être en retrait et de se noyer dans la musique implacable et froide tout au long de Nihl, vous terrassant et vous plongeant ainsi dans les ténèbres.

 Tout cet album est un marasme de cohésion, chacun de ces titres s’emboîte au fil de l’écoute comme les pièces d’un puzzle offrant à Altarage un support adéquat pour révéler son art à son auditoire. En fait cet album se vit comme une expérience, il faut s’asseoir, se couper de tout et se laisser embarquer dans l’univers purement personnel du groupe. Chacune de ces chansons agit comme un acte chirurgical sur vous, officiant dans différents domaines, tantôt vous broyant, tantôt vous transportant dans des méandres ténébreux.

Mais à mes oreilles trois titres se démarquent réellement du lot, ‘Graehence’, ‘Altars’ et ‘Cultus’ chacun étant représentatif de ce qu’est cet album. Le premier vous marquera dans votre âme, vous laissant une marque inaltérable, ces riffs lancinants vous hypnotiseront pour ensuite laisser place à un matraquage qui n’aura pour but que d’annihiler votre raison. Ce titre fait office de scalpel vous disséquant et vous retirant toute sensation de « vie ». C’est sur cette piste que le fameux chant fantomatique opère le mieux sa fonction, l’impression d’être face à des hurlements murmurés, voilà l’image qui me vient en tête ; comme si ça ne suffisait pas, il se conclût par un martelage intempestif accompagné de riffs donnant une impression de suffocation, ce qui ruinera le peu de raison qu’il vous restera. Et ce septième titre, ‘Altars’ débutant par ces riffs guerriers qui ne sera sans vous rappeler les influences précitées, il continue le travail effectué par le début de l’album, vous laissant entrevoir un petit sursaut de vitalité, comme si vous alliez pouvoir vous réveiller de ce cauchemar auditif, mais il n’en sera rien, car ce titre n’est que furie, haine et folie, que ce soit ces riffs tranchants ou ce chant délibérément dénué de puissance, permettant justement de pouvoir retranscrire toute cette négativité. Le processus entamé continue, de nouveau ces riffs et cette batterie réapparaissent afin de vous clouer sur place. On pourrait se dire que c’est terminé, qu’on va pouvoir sortir de cette folie destructrice, mais il n’en est rien, car ‘Cultus’ arrive pour parachever le travail. Ce titre se veut un peu plus éthéré, ce qui est un oxymore bien sûr, car la musique du groupe se veut toujours aussi hermétique, mais elle s’octroie des ralentissements, jouant davantage sur les atmosphères, laissant entrevoir à l’auditeur un temps de répit. Mais ce que l’on nomme communément ainsi n’est autre que la fin de l’agonie que notre âme aura subie tout le long de cette écoute.

Ne vous méprenez pas, chacun des termes employés ont été pesés, toute cette négativité ne se retranscrit pas sur la musique du groupe, qui est d’une qualité rare, ce sont juste les affronts que subiront votre âme à l’écoute de ce bijou de noirceur. Pour quiconque n’étant pas prêt il est clair qu’Altarage ne fera aucun effet mais pour l’auditeur éclairé, « Nihl » permettra d’atteindre un univers dénué de lumière, il sera seul face à lui-même, seul face à ses émotions, seul face à son humanité affligeante. Comme je le disais plus haut, cet album est une expérience à vivre. Et comme toute expérience, elle ne sera pas bénéfique à tous, chacun y trouvera sa part d’ombre. Pour ma part c’est un plaisir de me plonger dans ces ténèbres, et il me tarde la sortie de cet album prévue le 26 février chez Iron Bonehead.


______________________________
Auteur : KhxS


Commentaires