Chronique | Issfenn - ''Issfenn" : Vieux pots et soupe poicreuse


Issfenn - "Issfenn", 2011

Tracklist

02. Plague Bringer
03. Bicephalic
04. Helm of Hell
05. Mindless March
06. Bile
07. Light's Last Sigh on the Equinox

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A la vue de ce serpent bicéphale au chromatisme rougeoyant qui constitue l'essentiel de l'artwork de l'album avec le nom du groupe, on peut être perplexe. Comme une impression de nudité. Là où le Black Metal nous montre assez régulièrement des forêts brumeuses peuplées de bipèdes peinturlurés, saupoudrés finement d'une iconographie sortie directement du fondement du malin, cette économie sémiologique surprend.

Concernant l'album (datant de 2011) il s'agit de la pièce inaugurale d'un duo canadien (d'où le serpent à deux têtes), de Montréal pour être exact, où l'on peut trouver Xost à la guitare et chant et Vitrid à la batterie, basse et chant. On a sept morceaux pour un peu plus de trente-cinq minutes. L'album est donc assez court.

L'album s'ouvre avec The betrayal qui « annonce la couleur ». Issfenn dispense un Black Metal archaïque. Les influences punk et thrash qui furent à l'origine celles du black sont ici très prégnantes et assumées. Du fait de ce retour à un black old school, on est en terrain connu en ce sens qu'on sent clairement les différentes influences. Le son et la prod' rappellent les galettes de black du début des années 90. Les influences musicales vont chercher du côté de Darkthrone, Immortal ou encore Bathory.

A l'image de l'artwork, la musique est sans fioritures, des riffs thrashy et des passages presque groovy ou catchy (Bicephalic en tête), laissent place à des ambiances sombres et nerveuses. Comme on l'a dit on a affaire à un black archaïque. Ce dernier terme n'est pas à prendre de manière péjorative car l'arkhè (racine grecque) désigne l'origine ou le fondement. Il n'est donc pas question d'une axiologie chronologique qui verrait le terme comme substitue à « désuet » ou « dépassé ».
Ce black metal archaïque est à l'image du black des origines : protéiforme. Protéiforme car à l'instar du morceau The Betrayal qui débute avec un black nerveux et se finit avec des chœurs et une atmosphère que ne laissaient pas présager le début du morceaux, Issfenn arrive à concilier cette multiplicité constitutive du genre.

Mais il existe un danger inhérent à ce genre d'entreprise. L’exercice de cette prosodie passéiste n'est pas un terrain propice à l'originalité. A avoir trop le regard dans le retro' on oublie de regarder devant soit (oui, oui, c'est une métaphore pourrie). L’écueil est consécutif de la démarche mais il est assumé par le groupe. De plus même si l'album reste classique, il demeure très bien exécuté. A son écoute on se rend facilement compte qu'il ne s'agit pas d'un disque qui joue de manière opportuniste sur la fibre nostalgique mais une œuvre faite avec beaucoup de sincérité.
Pour un premier album cette démarche n'est pas réellement problématique mais il s'agira pour le groupe d'affirmer son identité par la suite.

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Auteur : Opyros


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