XCIII - "Like A Fiend In A Cloud", 2013
Tracklist
01. Reverie Nocturne
02. Bal Macabre
03. Hibernal Sadness
04. Feathers
05. Autums Call
06. Perpetual Place
07. Bal Macabre - Epilogue
08. Like a Fiend in a Cloud
Extrait à écouter :
Extrait à écouter :
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XCIII est un groupe d'Atmosphérique Metal Avant-gardiste formé en 2009. Leur premier album, « Like A Fiend In A Cloud », s’apprête à sortir cette année, via le label Allemand Naturmacht Productions. Il fait suite à une démo prometteuse de 2011 (également suivie et décrite par nos soins) et à un split avec le groupe de Black Metal Niçois Abyss Cerebrum. Nous retrouvons dans cet album le morceau 'Bal Macabre' présent sur le split. Le groupe XCIII a choisi son nom en référence au poème « A une passante » de Charles Baudelaire, appartenant au fameux recueil « Les Fleurs du Mal ».
L'artwork de cet album est signé Alexandre Lenoir de Retrographix. Il représente un paysage avec une femme en premier plan. Les couleurs sont sombres et lugubres. Le style très croquis de l’ensemble laisse l'esprit libre à toute interprétation. C'est une imagerie relativement gothique dans le sens noble du terme. Chaque élément renvoie à la mélancolie et au romantisme du XIXème siècle, le tout sur un ton « spleen ». Cet artwork de qualité nous invite à poursuivre l'exploration de ce monde, à l'écart du temps.
''La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ''
L'esprit ancien est là dès les premières notes. En l’absence de grosse guitare et de batterie violente pour nous accueillir. Jouée au piano, 'Rêverie Nocturne' est une introduction à ce monde. De quoi étonner l'auditeur. Cependant, sa surprise n’en restera pas là... L’album nous livre une Ode puissante et émotionnelle.
Le côté atmosphérique est retrouvé par l'ajout de nombreux éléments d'ambiance. Que ce soit une cloche d'église teintant lors du 'Bal Macabre', le vent soufflant sur 'Hibernal Sadness', ou le ruissellement d'une rivière dans 'Perpetual Place'. A son écoute, l’album est ponctué de ces bruits dressant le décor. Nous voilà projetés dans une réelle dimension onirique. Loin de notre temps, chacun de nos pas nous plonge dans ce nouveau monde avec ces sons si particuliers. Pour peu, nous penserions être dans un conte musical. Cette impression est d’autant plus renforcée par les passages chantés en clair, tels une narration. Il est difficile de décrire les émotions apportées par ces divers éléments auditifs. Ils renvoient à des perceptions et représentations propres à chacun. Ce qui est sûr c'est que cela rend l'album vivant en offrant à l'auditeur des repères sonores qui l’emmènent vers une réalité déchue.
Si l'auditeur n'est pas empreint de cette culture Romantique, il est peu probable qu'il soit touché par les notes qui se dégagent de cet opus. Celui-ci est un véritable mélange musical travaillé sur plusieurs niveaux. L'instrumentation oscille entre violence musicale et moment d'accalmie, parfois mélangeant même les deux. Tel est le cas sur 'Bal Macabre', où la batterie est typée Black avec un piano en fond jouant sa propre mélodie. Paradoxalement, les passages calmes gardent eux-mêmes une certaine violence. A nuancer qu’il s’agit d’une violence intérieure propre aux auteurs romantiques des siècles passés, ainsi qu’à XCIII. Ainsi, 'Hibernal Sadness' possède cette douce souffrance. Les notes du violon en fond donnent un coté éthéré et fugace au morceau. Initialement lourde d’émotions, nous ne pouvons pas nous approprier cette musique. L’auditeur ne peut qu’être un spectateur de cette tempête intérieure. Ce sont les songes d’un autre qui nous sont ici livrés.
'' Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? ''
Tous les morceaux présents sur cet album jouent sur cette puissance extérieure avec des passages dans un registre Metal puis d'autres Atmosphérique. 'Feathers' est un mélange de Black Metal et d'un Post-Black dans un genre commun à Alcest. Chaque genre trouve son équilibre dans cette composition originale et perturbante. Le tout reste toujours accentué par les éléments ambiants. D’un point de vue positif ou négatif, l'auditeur ne peut qu’éveiller son esprit face à la musique de XCIII.
D’autre part, nous retrouvons également une ambiance chère au Romantisme, à savoir : la Nature. Dans un esprit en accord avec la Nature, similaire aux démonstrations d’Agalloch, de nombreux éléments nous renvoient à une nature fleurissante : des oiseaux qui chantent, des bruits d'eau, ou encore la guitare sèche qui par sa présence renforce cet esprit. La musique de XCIII a ce côté naturel, parfois puissant et d'autres fois doux et calme.
'' Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.''
Ce dualisme musical se retrouve dans le chant. A la première écoute, nous sommes d’abord frappé par la présence de deux langues, l'anglais et le français. Il n'est en effet pas rare que les groupes mélangent l'anglais à leur langue maternelle. Cependant, lors des passages de chants clairs, dans la langue de Shakespeare, le chanteur conserve son accent français. Bien que certains crieront à l'amateurisme… Que nenni ! Cette impression cadre tout à fait avec l'esprit de l'album. En effet, quoi de plus aristocrate qu'un accent français sur un discours anglais tout à fait maîtrisé ? D'ailleurs lors des passages en chant guttural, l'accent n'est plus présent. Ce chant, violent et calme à la fois, est présent sur tout l'album à l'exception du premier morceau. Il étonne par sa maîtrise et ses différentes intonations. Nous passons aisément de la déclamation poétique à une voix gutturale noire et froide, en passant par le murmure fantomatique de 'Hibernal Sadness'.
XCIII nous confirme avec ce premier album les impressions de leur démo. Ils ont su évoluer et pallier les quelques défauts pouvant être notés sur « Majestic Grief ». Musicalement, il est abouti par un équilibre de chacune de ses parties. L'album s'écoute d'une traite sans temps mort. Les variations musicales lui confèrent sa propre dimension. Nous ne pouvons nous contenter de rester passif à son écoute. Il vient chercher nos plus profonds sentiments pour les faire ressortir et les exacerber. Toutefois, il faut encore que l'auditeur soit réceptif à ce style musical. Ce n’est donc pas un album à laisser entre toutes les mains. « Like A Fiend In A Cloud » dénote du paysage musical, surtout par le français. Bien que les influences s'entendent, XCIII a une réelle personnalité, difficile à aborder de prime abord.
Pour moi l'album de XCIII est comme une nuit de pluie en forêt, mise en musique.
''Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !''
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