Chronique | Epitimia - "Faces of Insanity" : un cas clinique de souffrance

Epitimia - "Faces of Insanity", 2012

Tracklist

01. Reminiscentia

02. Epikrisis I: Altered State of Consciousness

03. Epikrisis II: Intrusive Thoughts

04. Epikrisis III: Megalomania

05. Epikrisis IV: Jamais Vu

06. Epikrisis V: Rorschach Inkblot

07. Epikrisis VI: Leucotomy

08. DS: Schizophrenia (extrait à écouter)

09. Lethe 

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      Epitimia est un groupe d'atmosphérique Black Metal originaire de Saint-Petersbourg, en Russie. Formé en 2008 par A. qui assure l'ensemble de l'instrumentation et K. au chant, ils sont rapidement rejoints par M. au violon en 2009. Ils ont à leur actif trois albums dont ''Faces of Insanity'' sorti en 2012 chez Hypnotic Dirge Records. Leur première Démo, ''О Ты, Чье Имя Мрет На Трепетных Устах'' est sortie en 2008 ; le premier album du trio ''To The Non-Existing Shades'' est quant à lui sorti en 2009. La même année sort un Split avec, Nirmal, Circle Of Ghost et Man O'Moon intitulé ''Five Roads To Eternity. En 2010 ils sortent encore un Split avec Gmork, ''Солнечный ветер / Четыре сезона '' et leur second album, ''Four''.

En français le mot Epitimia signifie Pénitence.

L'artwork de l'album a un effet esthétique proche de la peinture avec un effet brossé qui anonymise l'homme présent sur celle-ci. Cette volonté d'anonymat se retrouve dans le choix des pseudonymes des artistes. Les couleurs mettent le personnage en avant avec des tons clairs, contrairement au fond qui tend vers le noir-gris. La pâleur et les teintes de couleurs nous font penser à un être malade. La silhouette, sans bras et blanche, est semblable aux esprits tourmentés dans les asiles, cloisonnés dans une camisole et dans des chambres ternes.

Seul son oeil est clair et vif, tâche de lumière dans ce sombre tableau, son âme est lucide quant à sa souffrance.

Avant même que ''Face of Insanity'' ne commence les artistes nous mettent en présence de leur perception de la solitude de l'être humain et de sa souffrance.

L'album débute avec le titre 'Reminiscentia'. Une guitare claire et bruissement de cymbale nous accueillent. Puis un hurlement se fait entendre en fond. La guitare devient plus lourde, plus sombre, la batterie suit cette évolution. Les hurlements se sont tus. Le morceau n'est qu'un prologue à la folie d'un homme.

Plongeons à l'intérieur de celle-ci. ''Face of Insanity'' se compose en chapitres tous précédés par le mot Epikrisis. Ce terme désigne une analyse d'un cas médical. Il y a six chapitres, puis deux autres titres.

La première partie de Epikrisis s'intitule 'Altered State of Consciousness'. Dans la continuité musicale du premier titre il est néanmoins plus léger, avec une guitare claire en fond. La voix nous parvient, c'est un guttural froid et profond.

Des sonorités electros marquent le début de ce dernier. Il laisse par la suite place à un chant clair en fond, la musique est à l'image de celle-ci ; une alternance se crée dans la musique et dans l'esprit de l'homme.

''Intrusive Thoughts'' suit ce premier chapitre.

La guitare nous fait évader de notre corps puis nous nous retrouvons d'un coup ré-emprisonné dans cette enveloppe charnelle. La voix transmet la souffrance de cette situation avec un chant dépressif et torturé. Chaque phrase, chaque mot est emplit d'une tristesse palpable. Le morceau enveloppe notre âme d'une douce souffrance pour mieux nous enchainer à une réalité que nous voulons fuir.

Le stress est grand avec une instrumentation rapide, les cymbales ponctuent et saccadent le titre. La guitare oscille entre rythme rapide et lent. Tout est mit en oeuvre pour que nous ne puissions pas nous habituer à cette souffrance.

''Megalomania'' ne possède plus d'introduction comme les précédents titres. Nous sommes immédiatement pris dans les tourments de l'âme. L'instrumentation est saturée. Le chant est un mélange de Black et de Depressive, profond et sans force : il n'est que souffrance.

Les sonorités suivantes tendent vers du Post-Rock/Post-Black, claires et éthérées. La basse fait la transition entre une partie atmosphérique et le chant. Durant ces parties notre esprit tente de fuir du corps entravé.

Le morceau suivant est étonnamment écrit en français, ''Jamais vus'', mais ne vous attendez pas à un titre chanté dans notre langue, il est lui aussi en russe.

Présent dès le début le guttural est décomposé, chaque mot raisonne et se grave. La musique est languissante et accompagne, en fond, ce triste chant.

Le titre est ponctué de passage instrumentaux où l'on pourrait profiter d'un moment musicale sans être atteint par la douleur, mais c'est sans compter l'ambiance qui s'en dégage...

Une voix claire nous plonge par la suite dans un esprit enfermé : elle raisonne et se mue en crie aigu. L'auditeur est agressé.

Il souffre et il veut nous la transmettre.

''Rorschach Inkblot'' est l'avant dernier chapitre de Epikrisis. Il début sur un rythme plus rapide et entrainant mais ce n'est que de courte durée. Des sonorités Post-Black font leur apparition suivi rapidement par le guttural.

Le titre reste plus rapide que ses prédécesseurs. La musique ne change réellement que lors des parties où le chant est absent.

''Leucotomy'' est le dernier et sixième chapitre de cette histoire. Les sonorités qui nous accueillent sont typiquement Black : guitare saturée, dissonance - s'en suit un retour au Post-Black. Le coté dépressif du chant est renforcé. La musique nous fait évader de notre corps et la voix nous fait présager un nouveau monde, pas forcément meilleur que celui que l'on quitte.

Le titre ''D.S Shizophrenia'' fait penser à un Post-scriptum d'une lettre mortuaire. Bien que s'inscrivant dans la continuité de l'album mais pas dans ses sonorités, il est plus rapide et agressif. Il regroupe les deux voix pour créer une danse de la folie.

C'est un va et vient entre les deux esprits qui tiraillent le corps de cet homme. Il y a dans se morceau une réelle évolution. Le chant dépressif aigu est plus marqué, il prend le contrôle de cette carcasse délaissée par un esprit qui a préféré fuir cette réalité

Dans le dernier titre qu'est ''Lethe'' des sonorités aquatiques se font entendre. S'ajoute à une guitare claire résonnante, une seconde plus saturée qui emprisonne la première avec sa mélodie. Puis des bruits électriques viennent parasiter cette ensemble onirique. Ce sont les bruits des machines de réanimation. Puis elle laisse place au bruissement des vagues et de la mer, symbole de liberté.

Il est enfin délivré de son enveloppe charnelle et de sa souffrance.

Chaque morceaux qui compose 'Face of Insanity' propose une ambiance différente tout en gardant un même esprit du début à la fin. L'album est une représentation musicale des souffrances qui habitent cet être. Chaque titre représente celles-ci jusqu'à sa libération.

C'est un album difficile à saisir dans le sens où la formation nous offre la souffrance d'un être unique. Nous pouvons donc être touché par celle-ci où non...

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