Scholomance: Alors première question, comment présentez vous votre projet qu'est Soror Dolorosa ?
Andy Julia: Alors, le projet Soror existe depuis une petite dizaine d'années. Le nom du groupe vient d'une idée d'Hervé : il est issu d'un roman de "Bruges-la-morte" par Rodenbach qui est un roman du XIXe qui appartient vraiment au courant symbolique, romantique et existentialiste. C'est un auteur Flamand et donc, en fait, on part d'une idée très profonde, très pathologique, très romantique. Et c'est une couleur permanente dans ce que l'on fait, bien que parfois certains morceaux puissent être plus planants, plus agressifs mais le fond du sujet reste toujours comme ça.
Ça fait à peu près 10 ans qu'on existe. On a un EP et un album. On a signé pour trois albums sur un label allemand qu'est, Beneath Grey Skies qui est une sous division de Northern Silence, qui a déjà sorti Amesoeurs, le premier vinyle d'Alcest, aussi donc voilà. C'est des choses qui sont déjà regroupées en terme de scène, on les accompagne sur leur tournée et sur diverses autres choses.
Scholomance: Oui c'est pas toi le photographe officiel de Alcest ?
Andy Julia: Oui c'est ca, et voilà ça nous permet de joindre nos univers sur une tournée.
Scholomance: Cela doit être intéressant de pouvoir tourner avec un groupe comme Alcest ?
Andy Julia: Oui c'est très intéressant surtout que les couleurs des groupes sont très différentes. On avait prévu la chose comme ça : nous on annonçait avec quelque chose de froid de planant ; après Les Discrets c'est encore une autre étape ; et après, Alcest, c'est tout en lumière. Nous c'est la mort et après Alcest c'est la vie, la renaissance... Ce genre de choses...
Scholomance: Donc il y a une certaine continuité ?
Andy Julia : Oui part rapport au "Voyage de l'âme" c'est ça, nous annonçons le début et Alcest le futur. Quelque part en terme de thématique c'est comme ça qu'on le voit.
Scholomance: C'est un peu une concept tournée ?
Andy Julia : Ouais.
Scholomance: Comme nous sommes quand même dans les années 2012, c'est le Metal où même le Pop Rock qui prime, la Coldwave c'était plutôt les années 80's. Alors comment en êtes vous arrivés à vouloir remettre sur le devant de la scène ce mouvement ?
Andy Julia : En fait je pense qu'on s'est pas trop posé la question. Déjà, on est très influencés par les choses que l'on écoute de cette époque, comme The Joy, les Cure, ce genre de choses mais on écoute pas que ça du tout. On écoute des trucs des années 70's ou même Black Sabbath. On se pose pas trop de questions, on essaye d'être assez frais. On répète, en général on se réunit on compose à quatre, y a pas une personne qui compose spécifiquement. Les compos partent de riffs de basse de Hervé, parce qu'il a toujours l'habitude d'amener en premier des riffs de basses. C'est pour ça que la basse est très importante contrairement, justement, au Metal. Encore une fois c'est quelque chose qui varie la tournée, car les autres groupes sont plus basés sur la guitare, donc là c'est la basse qui a aussi son rôle.
Franck: Etant donné qu'on part souvent de la basse et que Hervé et moi (batteur), entre autre car on est la section rythmique, et on a quand même un autre âge : Hervé a 42 ans, moi 37, donc nous on est old school à ce niveau là. Dans ce qu'on écoute, dans ce qu’on ressent, on est pas du tout, enfin peu, dans cette mouvance du Metal donc forcément on écrit des choses qui nous correspondent, et comme la base rythmique fait quand même l'essentiel de ce qui passe dans la musique, forcément on se retrouve avec une couleur très 80.
Andy Julia: En fait c'est vrai qu'il y a une différence d'âge dans le groupe très importante. Par exemple Hervé a acheté les albums des Cure quand ils sortaient ; moi et le guitariste on les a découvert justement parce qu'on s’est rencontrés et qu’on les a écouté et découvert ensemble. Donc ça donne quelque chose qui, pour nous qui avons une génération de moins, sont des choses que nous avons découvert sur le tard mais en étant passés avant par le Metal. On avait pas forcement envie de continuer à faire du Metal. On avait envie de plonger un petit peu plus loin et puiser autre chose. Amener une couleur nouvelle parce qu'il n’y a pas beaucoup de groupe qui font de la Coldwave aujourd’hui, qui sonnent comme ça ou qui ont cette couleur sonore.
Hervé : Ça nous permet d’écrire des morceaux qui sont plus personnels, en s’éloignant de ce qui est un peu plus standard. Tu te poses pas de questions, tu laisses les choses venir et du coup d’écrire une musique vraiment personnelle surtout du fait que, comme nous écrivons à quatre, ça rend vraiment une identité en soi.
Scholomance: Ça vous permet vraiment de faire la musique que vous aimez.
Andy Julia : C’est vrai que le fait de se réunir et d’écrire ensemble c’est très seventies, comme pouvaient le faire des groupes d'avant, ce qui nous permet de prendre plus de temps. Aujourd’hui des musiciens comme Neige ou Fursy ont plutôt tendance à s’enfermer chez eux pour composer un album, aller en studio pour l’enregistrer. Alors que nous on va plutôt se réunir, enregistrer des plans, des choses qui tournent, des jams en fait, et c’est sur ça qu’on détache en fait et qu’on va composer un album. C’est vraiment un travail à quatre et ça fait une grande différence.
Scholomance: Ça vous permet de mélanger vos univers ?
Andy Julia : Oui tout à fait
Scholomance: Justement j’aimerais savoir quelles sont vos grandes influences musicales, tu m’as dit les Cure, mais également vos influences littéraires et artistiques en général, car c’est vrai que j’ai vu votre clip et il est très imagé et rempli de symboles.
Andy Julia: Pour l’album "Blind Scenes" on a eu une inspiration majeure sur la période de la sécession viennoise avec Klimt (peintre symboliste autrichien) qui est le plus connu. Et là en fait c’est Koloman Moser (peintre et designer autrichien, représentatif de l'Art nouveau de Vienne) qui dessine une carte de tarot qui représente la mort et ça se passe à Vienne en 1900. C’est toute une époque où les artistes ont un peu brisé les codes de la normalité, sont allés plus dans leurs préoccupations personnelles et nous on fonctionne un peu pareil en musique. Et donc, en plus du coté esthétique qui nous plaisait beaucoup, c’était aussi une façon de faire un clin d’œil à nos pairs, qui ont fait la même chose à leur époque et ça encore une fois c’est quelque chose de très marquant.
Le second album sera peut être marqué par une autre patte, un autre univers, je sais pas encore. Quelque chose de beaucoup plus contemporain ou plus ancien, on verra. Nous sommes en train de travailler dessus, on est en train de réunir les pièces du puzzle pour faire un objet qui soit harmonieux comme celui-là. C’est très important pour nous de faire quelque chose de très mystérieux. Il n’y a pas toujours toutes les réponses qui sont données, il faut les chercher, allez gratter, il faut lire les textes, il faut se plonger dedans. On fait pas de la musique pour la consommation rapide. On a plutôt envie de faire des albums qui vont rester, qu’on puisse garder dans sa discographie, d’où le choix absolu aussi de le faire en vinyle, car la manière d’écouter est différente.
Hervé : Rien que le fait de tourner le disque ça implique une plus grande implication dans ce que tu écoutes.
Andy Julia: Ça c’est en réaction aussi à la sur-consommation de la musique. Les labels se mettent à produire de beaux objets et le public aussi se met à les consommer de manière un peu plus attentionnée parce qu'on s’aperçoit que d’avoir 120 morceaux sur son MP3, c’est pas forcément ce qui va faire avancer son esprit. Parfois il vaut mieux mettre la main sur un vinyle qui va vraiment venir te toucher très fort que de consommer de la musique trop abondamment . C’est quelque chose que nous faisons nous même : on consomme pas énormément, on a plus tendance à faire attention à ce qu’on écoute plutôt que d’écouter mille trucs en même temps,
Hervé : C’est vrai ça m’a permis de me réécouter toute la période Killing Joke
Andy Julia : Oui toute la période New Wave de Killing Joke et les trois premiers albums.
Scholomance: Ça permet de pas trop se disperser et de vraiment découvrir un artiste.
Andy Julia : Oui effectivement de découvrir ce qu’a vraiment voulu faire le musicien et pas simplement un truc dont on a entendu parlé comme ça, vraiment se plonger dedans. En plus, c’est ce qui se passe avec Alcest. Je pense que les fans se plongent vraiment dans l’univers d’Alcest et c’est une très bonne chose car c’est pas un groupe qui est là juste pour faire du divertissement. C’est quand même un groupe qui a vraiment un univers à part entière et là, encore une fois, nous sommes vraiment d’accord sur le sens de la musique.
Scholomance: Ce qui explique que vous vous soyez retrouvés sur cette tournée, ce n’est pas uniquement musical c’est aussi vraiment dans une même idéologie.
Andy Julia: Oui effectivement, il y a toute une idéologie, une vision des chose. Le nom même de la tournée est un nom assez global mais il correspond bien, c’est bien choisi.
Scholomance: C’est intéressant de mettre de la Coldwave et du Post Black Metal, je trouve que ces mouvements sont assez proches.
Andy Julia : Oui parce que c’est mieux pour un plateau comme ça d’avoir un groupe diffèrent qui ouvre, qui chauffe la salle, et qui va un peu accrocher les oreilles des gens plutôt qu’un groupe qui soit un sous Alcest ou Les Discrets qui créerait un ton sur ton. Ce qui serait moins original et moins moderne en fait. C’est pour ça qu’on s’est rassemblés comme ça et nous en sommes très contents en fait.
Scholomance: Cela permet une nouvelle diversité musicale et aux gens qui sont venus pour Les Discrets ou Alcest de s‘ouvrir à autre chose.
Andy Julia : Bien sûr, surtout dans des lieux comme la France car c’est vrai qu’en Allemagne, où la Coldwave est encore très présente, cette année par exemple au Wave-Gotik-Treffen il y a eu With Misfits en tête d’affiche pour fêter les 20 ans du festival, on nous appelait pour jouer, ce qui est fabuleux. On a joué avec The March Violets groupe culte des années 80, londonien. Du coup, on a pu voir vraiment quel était notre public et on sait qu’il est principalement en Allemagne pour le public de masse. Les allemands ont l’habitude de consommer ce style, mais il faut l’amener ailleurs, en Italie, en Angleterre, puisque, en Angleterre, les mouvements musicaux changent énormément et ils ont plus tendance à écouter les choses des années 80’s là bas. On verra quel sera le résultat du public là bas. J’espère que ce sera bien et puis en France aussi, car c’est vrai qu’il ne se passe pas grand chose en terme de Coldwave.
Scholomance: Oui c’est pour ça que ça m’a étonné de voir un groupe de Coldwave en 2012.
Andy Julia : He bien oui ça existe.
Scholomance : Oui je confirme et j’en ai été agréablement surpris à l’écoute et j’ai vraiment accroché à votre univers musical et j’espère vraiment que vous allez continuer.
Andy Julia : Ho oui ça c’est sûr puisque nous avons signé pour trois albums donc pas de problème. Le second album on va y travailler encore plus longtemps. Il sera, je pense, plus complet et quelque part plus mature, en tout cas on va essayer, et puis on verra ce qu’il donne, donc voilà.
Scholomance: Et bien merci de m’avoir accorder un peu de votre temps et puis bonne chance pour la suite.
Andy Julia: De rien ça a été un plaisir.
Le site de Soror Dolorosa: http://www.sorordolorosa.com/
My Space du Groupe: http://www.myspace.com/sorordolorosa
Facebook du Groupe: https://www.facebook.com/sorordolorosa
Photos du Concert: Photos: ALCEST + LES DISCRETS + SOROR DOLOROSA @ Nice
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