Tracklist :
1 – En Secret
2 – Étandard
3 – Le Vertige (feat.
Boris Völt)
4 – Call Of
Duty
5 – I Am The Sun (feat.
Rula El Bahr)
6 – The Dark
One
7 – Among Noise (feat.
Rula El Bahr)
8 – Fast
Fashion
9 – Only
Remains
10 – Twisting
11 – La Plage (feat.
Rula El Bahr)
12 – Nothing At
All
13 – À Tour De
Rôle
14 – Here For The
Thrills
15 – Back From An
Endless Night
Extrait en écoute :
_____________________
C'est au commencement du
monde, dans la cité du ponant, perdu entre le vent, le crachin et
l'iode, qu'a pris forme le projet de Jean-Marc le Droff :
Egoprisme.
Le sieur, peu habitué
aux sonorités coldwave, darkwave et associées, s'est nourri, de par
ses rencontres, ses voyages, ses écoutes, de tout le courant
post-punk. Boulimique de connaissances et de rapports sociaux, il a
construit en quelques années un projet phare de la scène « goth »
bretonne, mélangeant habilement les synthétiseurs et les rythmes
dansants. De l'électro-coldwave, de la synthpop léchée, de la dark
disco endiablée avec des pointes de Jad Wio, Jacno,
Daniel Darc, mais aussi Donna Summer ou même Jean
Michel Jarre. Du moins c'est ce qu'en était ressorti de ma
critique de la démo éponyme, à l'époque.
Après être passé chez
Beko Disques et TONN Recordings, c'est chez Manic Depression que se
tourne Jean-Marc. Autant dire qu'on augmente d'un niveau. C'est donc
ce 15 janvier qu'est sorti Among Noise, le tout premier album
de l'artiste sous le nom d'Egoprisme. Alors est-ce que le
projet a évolué après trois EP maîtrisés ? Et bien c'est ce
que nous allons écouter.
Premier passage. Je
trouve l'album très monolithique, surtout avec ses 15 pistes.
Attention, dans certains contextes, cela pourrait être une mauvaise
chose. Pas ici. Non. Ici nous somme en face d'un joyau brut que nous
allons tailler par nos réécoutes successives. Et Dieu seul sait
combien il y en a eu pour ma part. Le mastering aux petits oignons de
Christophe Galès y est sûrement pour quelque chose. J'en suis
ressorti avec une certitude : cet album est fait pour danser.
Cela se retrouve
également au niveau de la pochette très minimaliste. Logo, nom de
l'artiste, titre de l’œuvre. Noir sur fond blanc. Une fresque de
style Bauhaus à l'intérieur, une œuvre de Jean-Baptiste Stéphan.
Tranchante.
Structurellement, on
trouve sur l'album des titres issus des précédents EP comme "Here
For The Thrills" (EP#01), "En Secret", "La
Plage", "I Am The Sun" (EP#02), "Étendard"
(Once You Get There) entre autres classiques, mais aussi "Call
Of Duty", "The Dark One" "Back From An Endless
Night", ainsi que de nouvelles compositions. Enfin, nouvelles
pour celles et ceux qui, contrairement à moi, n'ont pas tourné dans tous les
concerts donnés par Jean-Marc.
On entre donc directement
et sans amorce dans le vif du sujet avec "En Secret" et
"Étendard", qui annoncent la couleur et la recette : boîtes à rythmes minimalistes, séquenceurs, basse dans un registre
haut, arpégiateur omniprésent, nappe de synthétiseur, guitare.
La première partie du
disque file de cette manière. Une première collaboration avec Boris
Völt de Mode In Gliany sur "Le Vertige", une
chanson d'une rare poésie. Peu étonnant quand on prête une oreille
attentive aux œuvres du rennais, puis une pause avec "Call Of
Duty".
On reprend en beauté
avec le rythmé et coloré "I Am The Sun", deuxième
collaboration de l'album, avec l'artiste performeuse Rula El Bahr
cette fois, qui apparaît également sur les titres "Among
Noise" et "La Plage". Ces trois chansons sont, à mon
goût, les meilleurs titres de l'album. Serait-ce grâce à la voix de
Rula ? S'il y a corrélation, pas sûr qu'il y ait causalité.
Personnellement c'est le côté Depeche Mode, Clan Of Xymox
qui me plaît. Pas forcément original, mais diablement efficace.
Nous nous sommes bien amusés pour le moment, nous avons bougé nos petits corps et
nous avons le sourire aux lèvres. C'est alors que vient le
raz-de-marée. "Among Noise" ne ressemble à rien d'autre
entendu pour le moment. Le titre, qui a donné son nom à l'album,
est bien plus rapide et surtout bien plus sombre que les précédents.
Du moins en matière de musicalité. Paradoxe étrange, là où les
paroles sont plus profondes, la musique se fait plus légère, et là
où les paroles se font plus superficielles, c'est la musique qui
coule dans un gouffre de ténèbres. Comme si Egoprisme
recherchait une sorte d'équilibre hydrostatique...
"Among Noise"
est le premier pivot de l'album. Car si on avait pu écouter la
première partie du disque de manière peut-être un peu distraite,
impossible maintenant de décrocher les oreilles. Le cerveau comme
aspiré dans une spirale. "Fast Fashion", "Only
Remains" et "Twisting" sonnent comme plus mûres, plus
griffues, comme cherchant à nous arracher quelque chose. On ressent
le vertige annoncé précédemment, une mise en abyme.
Deuxième pivot de
l'album : "La Plage". Si de prime abord cette chanson,
sonnant un peu plus pop et dansante, peut paraître anecdotique, elle
recèle une double face qui se révèle terrifiante quand on a la
clef de lecture. Je vous laisse le soin d'en trouver le sens.
Une fois compris, Among
Noise n'a plus eu du tout la même saveur. Bien loin de ce
premier entrain que j'ai eu à la l'écoute initiale, la deuxième
vague m'a percuté comme une lame de fond. Du coup rien d'étonnant à
ce que la piste suivante se nomme "Nothing At All". Un
titre qui se répercute sur l'ensemble de l’œuvre à contrecoup,
qui résonne et parle forcément aux plus corbeaux des auditeurs
d'Egoprisme. Même chose pour "À Tour De Rôle",
grave, qui laisse une impression amère de désespoir mêlée de
colère et d'impuissance.
"Here For The
Thrills" et "Back From An Endless Night", compositions plus douces, aériennes et fluides, marquent la fin de l'errance.
Adieu aux corps mouvants, la prise de conscience est maintenant
totale. On redescend sur terre, avec l'envie encore plus forte de
replonger dans le bain, entraînés malgré nous dans un cycle sans
fin.
Cet album est comme un
triptyque, un film, avec son introduction, son déroulement, son
dénouement. Que nous nous attardions sur les paroles ou non, nous
aurons dansé. Car au milieu de tout ce fatras qu'est la société
actuelle, avec ses vices et ses conflits, ses codes et ses
compulsions, il est salvateur de lâcher prise. Nous nous fondons
dans la masse car nous ne sommes rien. Peut-être qu'il est là le
véritable message d'Among Noise :
dans un monde qui vacille, s'élever au-dessus du bruit.
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