Chronique | Dead - "Transmissions & Verse" (Compilation, 2015)



DEAD – « Transmissions & Verse », (Compilation d'EPs, 2015)

Tracklist :

1 - Human Light - 05:58
2 - No Place For Us - 05:18
3 - Revelation 03:47
4 - Anyway - 05:02
5 - Loser 04:50
6 - Push - 05:30
7 - My Friend - 04:21
8 - Firedrop - 04:30

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DEAD. « Mort »

Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai pu entendre parler de DEAD ces dernières années. Du coup j'ai essayé de les voir en concert. Première fois je n'ai pas pu m'y rendre. Deuxième fois pareil. Et comme on dit « jamais deux sans trois », ma frustration a commencé à monter. Du coup la quatrième fut la bonne et j'ai enfin pu découvrir la formation lors d'une soirée à Rennes, avec les groupes Saintes et Future.

Je ne sais pas si c'est le fait que l'on m'ait encensé le groupe, si j'avais une trop forte attente, ou bien si c'était le volume et les coups de la boîte à rythmes qui étaient beaucoup trop élevés pour un bar, résonnant à faire mal dans ma poitrine, mais malheureusement je n'ai pas du tout apprécié la prestation.

Par conséquent, lorsque l'on m'a demandé de faire cette chronique, j'ai été grandement gêné car très peu emballé par l'idée. Mais bon après tout comme on dit, « il n'y a que les abrutis qui ne changent pas d'avis », pardonnez-moi l'expression. J'ai donc décidé de ne pas rester sur une note négative et de redonner une chance à ce groupe un peu spécial.

DEAD est un jeune venu sur la scène post-punk. Le groupe, originaire de Rennes, ne s'est en effet formé qu'en 2012. Derrière ce nom de scène minimaliste mais au combien évocateur, se cachent Berne Evol au chant, Brice Gill à la guitare et Bernard Marie au synthétiseur et à la boîte à rythmes.

Si j'ai parlé de nom évocateur et de groupe spécial, c'est que celui-ci nous livre un mélange de post-punk, coldwave, noise, shoegaze et rythmes industriels. Un mélange synthétique, noir, froid, bruyant. Et c'est exactement ce que le groupe nous administre avec « Transmissions & Verse ».

« Transmissions & Verse » est une compilation de leurs deux premiers EP. « Transmissions » d'une part, sorti en novembre 2012 et « Verse » de l'autre, sorti en avril 2014. Cette compilation a été éditée sur cassette audio, limitée à 100 copies, par le label Cold Dark Matter en avril 2015.

Cold Dark Matter est un label français spécialisé dans les musiques étranges, étendant leur spectre de l'ambiant au drone, en passant par le doom, le black metal, la noise, ou bien encore les musiques industrielles. Tant que ça fait du bruit, que c'est chaotique et expérimental. Le label se veut très underground et orienté uniquement vers une poignée d'amateurs, ce qui explique le choix étrange et élitiste de la cassette et de ces 100 copies.

Visuellement, on dit adieu à la pochette rouge hémoglobine de « Transmissions » et au damier hypnotique de triangles de « Verse ». Place à la pochette bleue unie, minimaliste, avec une photo énigmatique et floue (une statue avec des enfants lumineux qui dansent autour ?), entourée d'un cadre blanc. Cet artwork a été réalisée par un certain Benjamin Moreau dans la plus pure tradition du post-punk, me rappelant au passage des pochettes d'albums tels que « Closer » de Joy Division, « In the Flat Field » de Bauhaus, « Deathwish » de Christian Death, « Green is the See » de And Also the Trees, « Lullabies » de Cocteau Twins, « 3 » de Violent Femmes, « Music for the Masses » de Depeche Mode, « Body and Soul » de The Sisters of Mercy, « Dawnrazor » de Fields of the Nephilim, « Batastrophe » de Specimen... Vous m’arrêtez quand vous avez compris l'idée.

Musicalement, l’œuvre s'ouvre par un cliquetis mécanique et une nappe de guitare incisive avec un effet d'éloignement comme un vieil enregistrement sur cassette audio. Ironie. Faisant probablement écho à la pochette, le premier titre, « Human Light »,  me semble, à premier abord, mal porter son nom tellement c'est froid et agressif. J'ai du mal à apprécier. J'écoute l'album  techniquement bien maitrisé. Avis mitigé. Je recommence. J'aime me faire du mal. Première piste donc, « Human Light », on aurait plutôt envie de se mettre dans le noir le plus total.

Croyez-moi ou non, mais c'est précisément à cet instant, en écrivant péniblement cette phrase que j'ai compris d'où venait mon problème avec le groupe. Je ne m'étais juste pas mis en bonne condition. Je ferme les volets. J’éteins toute source lumineuse et je mets le son à fond. La magie opère. Déferlante hypnotique proche de The Soft Moon. Mur de son et voix proche d'un murmure, j'arrive peu à peu à rentrer dedans, assez pour me laisser doucement embarquer.

Deuxième composition : « No Place For Us ». C'est pessimiste et j'aime. Cette chanson est pour moi la meilleure de « Transmissions ». Elle possède une musicalité qui me parle, proche d'un Joy Division version noise. D'ailleurs « Transmissions » / Joy Division... Coïncidence ? Je ne pense pas. La fin de « No Place for Us » me fait indéniablement penser au titre « Painful » du groupe électro-rock français Sin. Parfois j'entends même du EZ3kiel. On enchaîne avec le très rythmé et robotique « Revelation » que j'apprécie également. Changement radical avec « Anyway », qui tranche totalement avec le côté sombre des trois premiers titres. Titre planant et enchanteur. Y-aurait-il de la lumière dans cet océan de noirceur ?

«Loser» répond à cette question : « Non ». 

DEAD amorce, avec « Verse » un léger virage, tout en gardant une cohérence avec la première face. Le son se fait moins noisy et lorgne plus sur le post-punk avec quelques passages électroniques. Sur « Push », la voix se fait moins murmure et devient plus présente, plus grave, plus appuyée, à la Ian Curtis. Puis arrive « My Friend ». Cette composition m'a fait sourire la première fois que je l'ai écouté, tellement son introduction et sa boucle électronique est proche de celle du titre « Ozar Midrashim » d'Information Society. Et quand on connaît mon admiration pour le travail de Kurt Harland, on comprend pourquoi j'aime tout particulièrement cette chanson du trio rennais. On finit avec « Firedrop » et son final étrange,  comme si on avait enclenché le retour en arrière sur son lecteur cassette. La boucle est bouclée.

Avec des compositions comprises entre quatre et cinq minutes, des rythmes anguleux répétitifs et un bruit de fond permanent, DEAD s'inscrit dans une sorte d'approche psychédélique froide, limite darkwave voire ethereal wave. Le groupe nous produit une musique lente et glacée, sursaturée, qui cherche à tout prix à nous noyer dans des brumes abyssales de bruit blanc, fil conducteur de cette compilation.

Finalement j'ai plutôt apprécié et j'écris la fin de cette chronique en forme de Mea Culpa. Comme le dit le label Cold Dark Matter, à recommander à tout amateur de A place to Bury Strangers, The Soft Moon, Cranes, Bauhaus et Joy Division. A déconseillé par contre aux oreilles sensibles à la noise, aux bruits lents et agressifs.

À travers « Transmissions & Verse », on plonge dans le désespoir. Le spleen du chant venu d'outre-tombe nous submerge. Mais rien n'est perdu, car tant qu'un son est émis, c'est qu'il y a de la vie.


DEAD. « Mort »
Pas tant que ça.


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Aladiah




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