Chronique | CÂN BARDD - Nature Stays Silent (Album, 2018)


CÂN BARDD - Nature Stays Silent (Album, 2018)

Tracklist :

1. Introduction
2. My Ancestors 
3. An Evolving Painting
4. Méditation Glaciale
5. Underwater
6. Océan
7. Abîme
8. A Gift For Nature

Streaming intégral :
 ___________________________________

Le Black Atmosphérique est vraiment un genre à part, un genre invitant au voyage, à l’abandon de soi pour une bonne heure en général selon la longueur des albums. Cet abandon se caractérise par une soudaine envie de lointaines vallées vertes aux ruisseaux constellés de réverbérations lumineuses que les nuages laissent passer par fin faisceaux. L’imagination n’est jamais autant provoquée que lorsque, couplé à un Folk bien amené, ce Black Atmosphérique vient chatouiller nos oreilles en quête d’autre chose.

Depuis quelques temps, ce Black presque lumineux tend à se développer de plus en plus, du moins l’on en voit davantage en ce moment. Je me suis véritablement plongé dedans avec Saor, bien qu’Enslaved et son Riitiir ait plutôt bien amorcé la chose. Le final de "Roots Of The Mountain" est tout de même grandiose non ? Imaginez maintenant de nouveaux instruments, de nouvelles ambiances faisant ressortir un côté traditionnel voire parfois médiéval. Vous voici en compagnie de Cân Bardd.

Le Suisse vient tout juste de sortir son premier album Nature Stays Silent. Et oui, c’est un seul homme qui est derrière tout ceci (bien qu’il ait été aidé par un batteur de session pour l’enregistrement). Parmi ses influences revendiquées, il n’est pas surprenant d’y voir inscrit les noms de Saor ou Elderwind.

La musique que développe Malo Civelli est un pur don de la nature, cette dernière étant sans aucun doute possible la principale influence de son album. Sans m’avancer, je le vois bien près de sa fenêtre organisant ses idées avec comme vision les vallées dont je vous contais les visions un peu plus haut. Plus sérieusement, la puissance de ses compositions est presque apeurante tant il sait disposer de son intériorité ainsi que de sa sensibilité. Les différents plans dépeignant une nature changeante se succèdent sans accrocs, comme si cet album était une réelle déclinaison du temps qui passe, des choses qui changent mais qui jamais ne rendent compte d’un changement abrupt. Tout ceci semble se rencontrer dans une sorte d’idéal médiéval qui, bien que la plupart des écrits musicaux de l’époque aient été perdu ou n’aient jamais été copié, paraît plutôt bien orchestré. Du moins, on a envie d’y croire et de pouvoir s’imaginer un monde à cheval entre réalité et fantasy.

Les approximations rythmiques du sieur ne font que renforcer cet idéal nous faisant peut-être pencher vers un bas Moyen-Âge pestilentiel sur les ambiances les plus sombres, même si dans l’ensemble ces dernières sont plus angéliques que démoniaques. Ces approximations donnent aussi un sentiment de sincérité compositionnelle, un côté humain qui est bien loin de la froideur relative à l’utilisation d’une boite à rythme qui serait calée au millième près. Chopin utilisait bien le rubato, pourquoi donc vouloir tout mesurer et tout encadrer ?

Le plus impressionnant dans ces compositions, c’est de voir les lentes progressions se construire petit à petit, se doter de nouveaux instruments, de nouvelles harmonies, pour enfin finir sur une apothéose sonore : l’introduction de l’album en est le parfait exemple car elle est construite uniquement sur une progression d’un peu plus de cinq minutes. On ne semble donc jamais tomber dans l’irréfléchi et bien au contraire, tout est contrôlé sans non plus tomber purement dans une vision linéaire qui aurait fortement desservi ces ambiances. Les structures sont d’ailleurs fortement changeantes et versatiles, permettant ainsi de couvrir des plans bien différents dans un seul morceau sans jamais tomber dans la redondance ou le déjà-vu.

Tantôt épique, tantôt illustrant la vie de tous les jours, Nature Stays Silent possède plusieurs visages qu’on ne pourrait déceler en une seule écoute. Loin d’être rébarbatif, l’album est toujours à nous proposer de nouveaux paysages sonores que l’on ne peut que dévorer des yeux, ou plutôt, de l’esprit. Rien ne nous interdit d’ailleurs de voyager dans d’autres paysages au travers de ces mêmes musiques : elles sont si denses que tout y est possible.
___________________________________
Maximilien

Cân Bardd

Commentaires