Chronique | CLAN OF XYMOX - "Medusa" (Album, 1986)


Clan of Xymox - "Medusa" (Album, 1986)

Tracklist:

01. Theme I
02. Medusa
03. Michelle
04. Theme II
05. Louise 
06. Lorretine
07. Agonised by Love
08. Masquerade
09. After the Call
10. Back Door

Extrait en écoute:


________________________________

Il n'est pas dans nos coutumes de remonter aussi loin dans le temps, mais lorsqu'on tombe amoureux d'un album et du groupe qui l'a enfanté, c'est un besoin que de le faire savoir. En pleine période Post-Punk grâce à notre chroniqueur Aladiah, il me semble opportun de faire connaitre au plus grand nombre un classique incontournable de la musique rock gothique, à savoir l'album phare de Clan of Xymox, "Medusa", sorti voici 31 ans chez le florissant label 4AD, qui a promu de nombreuses références comme BauhausDead Can Dance ou encore Cocteau Twins

Un spleen baudelairien m'envahit dès les premières notes du Thème I; les ambiances se font plus travaillées que sur le premier album éponyme paru l'année précédente, qui avait paru davantage direct sans occulter ce qui fait l'originalité de cette formation, entre synthpop et Cold Wave pour un résultat éthéré. Clan of Xymox affirme un style qui se rapproche davantage de la Dark Wave que Dead Can Dance a développé dans son premier album en 1984. D'ailleurs, les relations entre les deux groupes sont avérées avec la participation du Clan à la tournée anglaise des Britanniques, mais l'influence du premier sur le second n'est que pure spéculation étant donné que le groupe qui nous intéresse aujourd'hui conserve une identité plus Pop Rock et davantage légère, sans pour autant perdre en intensité. Pour en rester à cette comparaison, la bande à Ronny Moorings - seul membre originel de la formation aujourd'hui - ne prétend pas au caractère incantatoire de la musique hybride de DCD. Elle en reste à cette influence Cold Wave mêlée à des nappes de claviers et de sonorités électroniques empruntées à la New Wave, qui acquiert ses lettres de noblesse avec "Medusa". 

Comment ne pas tiquer sur 'Michelle' et ces vocaux qui lorgnent tant sur ceux de Ian Curtis, légendaire et défunte figure de proue de Joy Division? Très courte, cette chanson m'emplit d'ivresse et invite à une brève danse hystérique, avant que l'atmosphère ne me fasse retomber dans une anxiété mêlée de mélancolie, quel sentiment ambigu et inconfortable ! À la fois doux et torturé, noir et dansant, "Medusa" est l'incarnation contemporaine du romantisme, à mon sens. À son écoute, on se sent perdu et séduit par la noirceur de notre époque, se laissant langoureusement aller à une virée nocturne, les baffles à fond la caisse aux notes de ces refrains enivrants. Les sonorités aériennes assurées par les claviers donnent cette impression de flotter, de s'élever au dessus d'un monde bercé d'afflictions, ce sentiment ne faisant que s'accroitre lors de l'hymne guitaristique typique du Post-Punk que nous sert Ronny sur 'Michelle'. 

Les cris hystériques qui nous introduisent au second thème ne font que nous élever davantage en des sphères ténébreuses pour nous mener jusqu'à 'Louise' et ses refrains gémissants. Mais l'apothéose de cette léthargie atteint son paroxysme sur son héritière, 'Lorretine', instrumental aux basses envoûtantes et agonisantes, sobrement accompagnées de ces synthétiseurs si omniprésents dans les passages les plus nébuleux. Sur 'Agonised by Love', l'énergie vitale se re-déploie, l'espoir renait, les pas de danse encore lancinants martyrisent nos parquets, toujours avec ce fond vocal plaintif inspiré de Smith et Curtis. 'Masquerade' anticipe le shoegaze avec ses couplets rêveurs. L'un de mes titres favoris de l'album, onirique à souhait, contemplatif dans le sens le plus significatif du terme. Une chanson qui incite à se tenir le plus distant possible de la pourriture qui emplit l'âme de ce siècle pour faire face aux sphères de la mélancolie. Clan Of Xymox est solennel sans être pompeux, triste sans être souffrant; cet album, jusque là, sonne juste à mes oreilles.

Sur 'Back Door', c'est l'apothéose. Une rythmique dynamique nous prend aux tripes, la voix lancinante de Ronny se confond avec les cieux des claviers jusqu'à cette explosion d'angoisse ou d'espérance, je ne sais pas encore, mais je suis happé par ce cocktail aux saveurs orchestrales et spectrales, de loin le titre le plus efficace de l'album avec ce nouvel hymne de guitare à la fin, le même schéma que sur 'Michelle', qui donne envie d'appuyer sur la pédale d'accélération. Un morceau qui convie au dépassement de soi en s'attaquant aux cimes de la noirceur. Preuve que cet album frise la perfection, 'Back Door' conclut ce chef d'oeuvre de la meilleure des manières, avant le virage nettement plus electro et moins marquant des albums suivants.

________________________________

T.



Commentaires