Chronique | ACRIMONIOUS - "Eleven Dragons" (Album, 2017)


Acrimonious: "Elevend Dragons" (album 2017)

Tracklist: 

01. Incineration Initiator
02. The Northern Portal
03. Damnation’s Bells
04. Satariel’s Grail
05. Elder of the Nashiym
06. Kaivalya
07. Qayin Rex Mortis
08. Ominous Visions of Nod
09. Stirring the Ancient Waters
10. Litany of Moloch’s Feast
11. Thaumitan Crown 

Extrait en écoute:


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La scène grecque ces dernières années a pris une ampleur que l’on n’attendait pas dans le milieu Black Metal, en axant sa musique sur la spiritualité, avec notamment une scène gravitant autour d’artistes évoluant au sein d’Acherontas, Thy Darkened Shade, Blood Moon etc… élevant leur musique au rang d’Art.
Mais n’oublions pas Acrimonious, qui avec "Eleven Dragons", nous délivre une offrande dont dire qu’elle était attendue par les fans de Black Occulte serait un doux euphémisme, tant "Sunyata" avait subjugué les auditeurs. Il aura fallu patienter cinq années avant qu’Acrimonious ne daigne donner naissance à une nouvelle œuvre. La patience dont vous avez fait preuve sera dument récompensée, croyez moi.


Crée en 2003 par Cain Letifer, ce projet a su gagner en maturité opus après opus pour arriver aujourd’hui à nous délivrer "Eleven Dragons". Un Black Metal à l’influence spirituelle occulte très présente, mais qui se démarque de ses camarades par son travail de composition, sortant du carcan habituel des œuvres Orthodoxe stéréotypées.
Préparez-vous à un voyage d’une intensité rare, cet album est une ode aux mondes obscurs, écouter "Eleven Dragons" c’est comme effectuer un recueillement, on se coupe de tout, on se laisse subjuguer et on voyage dans un monde éloigné de l’univers terrestre. Derrière cette attente de cinq années, on sent que le travail de composition a été longuement muri à travers ces onze hymnes qui composent cette offrande, près de 70 minutes de cantiques furieux et occultes sont aux programmes pour cette écoute.

Une œuvre noire, voilà ce que m’inspire cet album, dans le sens musical comme textuel. L’approche a été travaillée, révélant des artistes à l’aura puissante. Dès les premières secondes on se plonge dans la musique du groupe, de par ses riffs captivants qui vous feront vous couper de ce qui vous entoure, comme des œillères qui vous guiderait dans la musique d’"Eleven Dragons". D’emblée ce qui m’a marqué c’est la production, qui offre une place prépondérante à chaque instrument, en prenant en compte le chant cela va sans dire. Un des éléments souvent oubliés dans les productions Black Metal est la basse, instrument qui là, prend toute son ampleur, permettant à cet album d’atteindre une autre dimension. Pour ceux qui avaient adorés "Sunyata" vous ne serez pas décontenancé, bien au contraire, vous serez fidélisés à l’art d’Acrimonious.
On sent que le travail de composition se veut plus subtil, jouant sur plusieurs atmosphères et laissant entrevoir plus d’agressivité, notamment encore une fois grâce à la production. Après seulement quelques écoutes j’ai été surpris par le fait que les musiques me sont restées en tête. Malgré le côté massif de cet album, il est aisé, une fois plongé dans les bonnes conditions d’en percevoir toutes les subtilités, ne provoquant aucune lassitude malgré ses 70 minutes.

Chaque morceau est composé de telle manière à ce qu’ils s’imbriquent parfaitement les uns aux autres, offrant une œuvre unitaire. L’alternance des influences permet à l’auditeur de se retrouver entièrement impliqué dans l’œuvre. Entre les parties catchy qui vous feront tremblées les cervicales, les passages mid-tempo envoûtants qui vous feront lentement glisser dans un état cathartique, tout sera relevé par ces fameux passages agressifs, ceux-là même qui déclencheront en vous ces sentiments d’hostilité vous donnant envie de vous révolter face à ce monde moderne dépourvu de toute spiritualité.
La piste de cet album, qui se sera démarquée de par mes sensibilités reste‘Satariel’s Grail’, elle est la quintessence même de ce qu’est le groupe à mes yeux, du moins mes oreilles, des guitares incisives et directes aux riffs magnétiques. Le jeu de basse qui tient une place si prépondérante, permet de mettre en valeur toute la composition de l’album. A noter que dans le genre « Orthodox Black Metal » la batterie est généralement axée sur les tempos lents, voire tribaux dans une certaine mesure, tout comme ici, mais il faut bien noter aussi qu’elle est empreinte d’une furie certaine, ce qui rajoute un cran à l’intensité déjà présente sur cet album, nous permettant une immersion complète au sein d’un album riche et lourd en émotions. Une musique qui vous touche l’âme et le cœur.

Le fil conducteur de cet album est le dynamisme qu’il dégage, malgré toutes les variations dont il fait preuve, à aucun moment il ne perd de sa ferveur. C’est le cas sur‘Elder of Nashiym’, commençant en arpèges accompagnés de chuchotement envoûtant pour ensuite enchainer sur un passage furieux et violent qui à son tour, embraye sur un passage où le tempo ralentit pour laisser place à une ambiance plus oppressante de par ses riffs épiques, toujours accompagné par ce jeu de basse complètement fou et enflammant la passion mystique enfouie au plus profond de vous.
L’album se trouve entrecoupé d’un interlude reposant et envoûtant, vous hypnotisant à travers ses sonorités délestées de toute forme de brutalité ou d’agressivité de par son jeu acoustique. Deux minutes trente de pure beauté éthérée faisant place aux guitares acérées qui viennent prendre le relai pour conclure magnifiquement cet interlude.

 On enchaîne directement de nouveau sur une musique captivante et virulente, la marque de fabrique du groupe. Et bordel ces foutus riffs qui s’immiscent dans votre tête pour ne plus vous lâcher, je ne m’attendais clairement pas à ça à l’écoute de cet album. Et il faut aussi noter que l’ambiance de cet album tient aussi du fait que le chant se veut en harmonie complète avec la musique, tant par sa hargne que pas sa pugnacité. Quant aux hurlements qui font souvent place aux solos, ils offrent un côté primaire et bestial lors de ces incantations qui sont tout bonnement incroyable. Vraiment je réitère, le travail de composition sur cet album est juste impressionnant, aucune note en trop, aucun ajout superficiel, tout est à sa place au moment où il doit l’être. Chaque composition prend le temps de développer son propre macrocosme, laissant le temps à chaque titre de pouvoir pleinement exploré son potentiel, ce qui explique la durée de cet album, mais si le groupe n’avait pas pris ce temps, il resterait comme un goût d’inachevé en bouche.

Clairement, si le reste de la discographie vous a plu vous pouvez immédiatement vous jeter sur "Eleven Dragons" qui est un palier au-dessus de leurs offrandes supérieures qui étaient déjà de haute qualité. La durée de cet album me faisait peur, mais comme je l’ai dit plus haut, ça n’est pas un disque que l’on écoute d’une oreille, il faut prendre le temps de se plonger dedans et de l’explorer, en se mettant dans les bonnes conditions d’écoute. Acrimonious vient de passer un cap, et il sera dur pour eux de pouvoir offrir mieux.

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KhxS



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