Chronique | BATHSHEBA - "Servus" (Album, 2017)


Bathsheba - "Servus" (Album, 2017)

Tracklist:

01. Conjuration of Fire
02. Ain Soph
03. Manifest
04. Demon 13
05. The Sleepless Gods
06. I at the End of Everything

Extrait en écoute:


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Une fois n’est pas coutume, je vais m’aventurer dans un autre registre musical que le Black ou Black/Death pour cette nouvelle chronique. Je vais passer à un style qui n’est pas ma spécialité, en même temps écrire n’est pas non plus ma spécialité tout comme être agréable ou encore courtois… Je digresse, je vais m’attaquer au tout premier album des belges de Bathsheba, qui officient dans un registre apparenté au Doom à tendance Sludge, avec des atmosphères éthérées et fuzzy. Un genre qui ne m’est pas familier mais auquel je peux trouver du charme, notamment grâce aux superbes  vocaux de Michelle, qui sur leur EP précédent « The Sleepless Gods » a su me conquérir grâce au titre éponyme, à son intensité, sa lourdeur et sa beauté, proprement subjugantes . C’est pourquoi j’attendais donc avec impatience ce premier opus sobrement nommé « Servus » qui sortira le 24 février prochain.

Après avoir découvert le groupe par hasard via leur précédent EP, j’attendais avec une impatience certaine ce premier album annoncé depuis quelques mois chez Svart Records.

Six pistes  pour quarante-cinq minutes de musique immersive, hypnotique et planante, voilà ce à quoi vous devrez vous attendre avec « Servus ». Cependant, force est de reconnaitre que le groupe aura su intégrer à son Doom  des influences de différents horizons, notamment grâce à la voix somptueuse de Michelle Nocon, qui passe d’un chant éthéré et planant à des vocaux hurlés et haineux, offrant un panel d’atmosphères variées et ouvrant sa musique à différents macrocosmes. Pour ceux ayant déjà écouté « The Sleepless Gods » vous ne serez pas décontenancés par ce premier album.
Dès le premier titre on se retrouve embarqué dans l’univers que le groupe nous aura fait découvrir à travers son premier EP, la formule fait mouche d’emblée avec cette musique lourde et abrasive qui saura vous transporter et vous faire voyager dans un univers occulte évoquant la sorcellerie. Les riffs sont captivants et envoûtants, ils s’imprègnent subtilement en vous et ne sortiront plus de votre esprit. Le tout est magnifié par le chant de la divine Michelle qui offre toute l’étendue de son talent sur cet album. Car elle n’est pas seulement apte à chanter de manière aérienne, mais est aussi capable d’apporter des cris possédés et violents, probablement des restes du groupe dans lequel elle évoluait auparavant, Serpentcult.

Ce qui me fait peur avec le Doom/Sludge, c’est que j’ai toujours l’appréhension de m’ennuyer très vite, de par la lassitude provoquée par des riffs joués en boucle, répétitifs, qui tournent en rond. Mais là non, car justement le groupe a su aller à contre-courant des clichés habituels et a su apporter à sa musique ses influences et envies, comme sur la piste ‘Ain Soph’ où le groupe s'est adjoint les services d’un saxophoniste par exemple, pour un résultat plus que probant. Après une entrée en matière plus couillue pour cette chanson, le tempo ralentit pour introduire de manière discrète une atmosphère plus pesante et ésotérique, notamment grâce encore à Michelle qui offre vraiment un panel impressionnant de son talent mais aussi par l’intervention à 2’05 du fameux saxo, nous replongeant dans les années 80, au temps où cet instrument avait encore sa place dans la musique sans pour autant passer pour un cliché comme de nos jours. Le fait de mettre un cuivre sur cette piste offre une profondeur supplémentaire à leur musique mais aussi à leur macrocosme et met ainsi en avant la volonté du groupe de suivre ses idées. Une réelle bonne surprise dont je ne me lasse pas.

Après, l’album retombe dans ses standards avec les titres comme ‘Manisfest’, ‘The Sleepless God’, ce qui en aucun cas n’est négatif, car c’est la base de la musique du groupe, une musique qui se veut atmosphérique, planante, captivante et vous faisant voyager dans son monde.  Je voulais éviter de revenir sur ‘The Sleepless Gods’ mais impossible pour moi de ne pas parler de ce titre encore une fois tant l’émotion qu’il dégage a su me toucher. La bonne surprise pour moi a été de retrouver ce titre issu de leur EP précédent, celui-là même qui m’avait fait tomber amoureux de Bathsheba. Un titre qui, comme indiqué plus haut m’avait subjugué par la voix de leur front woman qui a une voix magique et hypnotique. Lorsque le titre ‘Manifest’ se termine au bout de ses dix minutes et que je rends compte qu’il prend fin sans avoir vu le temps passer, je me dis que justement, l’enchevêtrement de toutes les influences et talents du groupe leur a procuré la maturité nécessaire pour atteindre ce niveau, ce qui n’est jamais aisé pour un premier album, il faut le reconnaître.
Entre ces deux titres s’est glissé ‘Demon 13’, premier single/vidéo clip du groupe à être paru, un titre qui m’a surpris car il se veut être plus agressif que ce que je connaissais d’eux avant d’avoir écouté l’album. Même s'il démarre sur un même accord joué en boucle et offrant une intro ensorcelante, l’instant d’après fait place à des riffs plus lourds et malsains, voire corrosifs, un titre où l’on sent Michelle possédée par sa musique et se laissant entraîner dans les confins d’un monde obscur, faisant transparaitre un chant plus hargneux et méphitique à l’image d’une musique plus ténébreuse que les précédentes. Un titre qui me rappelle des groupes comme Electric Wizard et consorts…D’une lourdeur implacable, comme si le groupe vous assenait une chape de plomb sur les épaules afin de vous faire plier sous son joug.
L’album se termine sur ce sixième titre qu’est ‘I at the end of everything’, le titre parfait pour terminer cet album, tant Michelle aura su donner une nouvelle dimension à son chant. Un rituel est offert à l'auditeur, un rituel accompagné d’une guitare aux riffs bouclés et hypnotiques, rejoints par des riffs lancinants et déchirants, qui nous guident dans un univers décharné et ensorcelé, où la magie et l’occulte ont une place prépondérante. À travers cet ultime incantation, Michelle et ses musiciens, grâce à leurs performances, nous accompagnent jusqu’à la fin de ce voyage nommé « Servus », nous offrant une conclusion irréprochable à un premier album triomphal.


Il faut bien l’admettre, l’équilibre trouvé à travers toutes ces atmosphères a éloigné les craintes que j’avais de m’ennuyer ou de me lasser. L’alternance des passages ensorcelants et des passages virulents offrent une parfaite harmonie à cet album qui est une réussite totale.

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KhxS
 

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