Chronique | LU JIACHI 盧家齊 - "Circle 圆" (Compilation, 2016)


Lu Jiachi 盧家齊 - "Circle 圆" (Compilation, 2016)

Tracklist :

Side A:

01. 澐 - 12:07
02. 霧的血色 - 08:56
03. 莯 - 15:13

Side B:

04. #1 - 09:17
05. #2 - 06:00
06. #3 - 14:28
07. #4 - 07:53

Side C:

08. Drums Part 1 - 09:23
09. Drums Part 2 - 09:08
10. Drums Part 3 - 03:43
11. Drums Part 4 - 14:56

Side D:

12. 崖 - 12:23
13. 圓 - 11:54
14. 返 - 09:12

Extrait à écouter :



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Oubliez … Oubliez votre monde, votre quotidien … Suivez les pas de Lu Jiachi (盧家齊) entre onirisme et corruption. Sa première compilation sortie chez WV Sorcerer est composée de titres en solo loin de son comparse de 破地獄 Scattered Purgatory. Le musicien taïwanais nous offre son introspection, le « Circle 圆 » d'un monde où le Drone et la musique tribale taïwanaise ne font qu'un.
'澐' ouvre ces quatre parties; chacune de celles-ci forme un cycle, les quatre parties communément établies, au final, constituent un cercle unique, total. Si elles forment un tout c'est aussi grâce à leurs différences, tout comme les rencontres qui façonnent notre vie. La première facette de celle-ci nous fait débuter ce voyage entre sonorités psychédéliques et mouvements languissants qui rappellent l'esprit cyber-punk du film Akira avec ses percussions hypnotiques. Apaisés et enivrés, nous prenons plaisir à suivre Lu Jiachi dans ses pérégrinations mystiques et introspectives. Elles s'écoutent autant, seuls face à nous-mêmes qu'en bande sonore où se superposent les bruits de la vie. Décrire cette partie c'est prendre un mot, une émotion d'un moment, un instant fugace et le teindre de multiples couleurs, le rendre atemporel. Nous ressentons tous les mêmes émotions et sentiments, sa musique nous fait ressentir les siennes, intimistes et singulières.

La suite se révèle plus électronique, les sonorités plus Noise / Industriel, comme une nouvelle histoire de ce 圆 (cercle). Les rythmes restent similaires aux rythmes tribaux du début mais le monde qui environne nos pas a évolué. La forêt de Taipingshan a laissé place à l'urbanisme de Taipei. Déambulation entre rues vivantes et forêts de béton et de gratte-ciels où le vent souffle pour dissiper l'enivrement premier de la grandeur de la civilisation.

La '#3' partie est pernicieuse, les gouttes d'eau résonnent sur une note Drone languissante, lasse et désenchantée. Le désespoir grandit et s'inscrit plus profondément, loin des ambiance premières, les quelques variations ne sont là que pour renforcer l'omniprésence d'une solitude qui devient claustrophobie, forme inhérente qui constitue notre monde. S'ensuit le retour des percussions tribales, seules et lointaines qui résonnent plus fortes, plus électroniques, plus Noise encore, avec l'ajout de bruits industriels.

Plus rapide, '#4' se fait l'écho d'une nature cloisonnée dans des cadres urbains mais aussi psychiques, les sons résonnent à la recherche d'un cœur ancestral. C'est dans la suite qu'ils retrouveront cet instinct. Les percussions électroniques et ethniques sont au centre des compositions, les éléments autres s'articulent autour pour rendre au tout une élévation mystique. Mais de courte durée … L'épilogue de cette partie n'est que Noise languissante et malsaine, les notes sont distendues et tissent des liens d'angoisse et de malaise. Il s'agit de la composition la plus longue de cette partie, comme si la vie après l’élévation et la recherche n'était que déception destructrice. Un cauchemar où vivent les troubles qui nous habitent. Lu Jiachi, nous offre le désespoir du vide de nos vies. La fin d'une improvisation alors que la fatalité est omnisciente. Le précipice (崖) est là, face à nous, les notes s’élèvent des abîmes pour nous rejoindre, attirer notre âme vidée, les sonorités Noise sont omniprésentes, pernicieuses et s'inscrivent dans la continuité de ce parcours de vie. La musique devient un retour sur soi. Le cercle (圓) corrompu de l’existence est de retour avec les percussions électro/tribales. Est-ce un retour de la lumière antique ou les gouttes d'une grottes inondée de solitude ? La fin nous donne la réponse, l'atmosphère est sombre, saturée et absolue. '返' marque le retour de la lumière de la clarté religieuse et devient le contraste total du titre précédent. Il pose les fondations d'un retour à la clarté.

Ce retour à la lumière, pose la question suivante : « Que garder de ce voyage? ». Retrouverons-nous la clarté pure et originelle ? Une clarté aveuglante qui dissipera tout dans une illusion de lumière, ou encore, cette lumière sera-t-elle à jamais voilée?

Lu Jiachi (盧家齊) nous propose dans cette errance son expérience, sa vision, ses moments d'improvisation face à une situation de la vie, un paysage onirique ou mélancolique. Le musicien se sert des styles comme des couleurs. Le Drone, la Noise et la musique Tribale constituent les ambiances et les atmosphères qui permettent le déploiement des paysages sonores qui composent l'ensemble de « Circle 圆 ».

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Auteur : Morgan



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